• Interview de Jean Felzine, du groupe Mustang (12 mai 2014)

    Interview de Jean Felzine du groupe Mustang, 12 mai 2014.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    « Ecran Total », le rock 50's, Buddy Holly, la quête de la chanson parfaite, les concerts, l’avenir, … Jean Felzine, leader du groupe Mustang, a passé tous ces thèmes en revue pour Little John’s Pop Life. Tenez-vous prêts : la tournée visant à défendre leur troisième album commencera en septembre.

    Interview de Jean Felzine, du groupe Mustang (12 mai 2014)

    Crédit Photo : Laura Moreau

    Baptiste & Gérald : A la lecture de l’interview de Mustang dans Magic (numéro 180, mars 2014), on a l’impression que vous êtes à un moment charnière de l’histoire du groupe …
    Jean Felzine : Je trouve que notre dernier album [« Ecran Total »] est vraiment super, j’espère qu’on pourra le défendre pendant une longue période. On a plein de titres pour essayer d’entretenir la machine. Il faut écouter tout le disque, il n’y a pas un morceau qui écrase les autres. L’album est dense, c’est à la limite du défaut, mais je pense que c’est pile le bon dosage. On va dire qu’il est consistant. Après, quoi qu’il arrive, il y aura des changements à opérer d’une manière ou d’une autre. Attention, je ne parle pas du tout d’arrêter Mustang, au contraire : je pense qu’il reste plein de choses à faire avec ce groupe. Mais on les fera peut-être un peu différemment.

    G : Pour votre dernier opus, comment avez-vous fait le choix des titres et des singles ?
    JF : C’est toujours très compliqué. Pour cet album, on avait utilisé le morceau Ecran total comme un teaser, puis on a fait un vrai premier single avec Le sens des affaires. C’est un titre qui prend plutôt bien, on était ravis d’entendre les gens reprendre la chanson pendant notre concert au festival Passer le Périph' par exemple. On arrive à le passer en radio. Ceci dit, peut-être que ce n’est pas notre destin d’être un groupe grand public, peut-être qu’il faut que je me sorte cela de l’esprit !

    B : Le journaliste de Magic évoque même « la quête du tube »…
    JF : Ce n’est pas une recherche de succès, mais pour nous la chanson idéale est un tube. C’est la pop song parfaite. Un exemple : Don’t Make Me Over de Dionne Warwick est une chanson parfaite, et du coup c’est un tube, parce que c’est imparable, parce que c’est magnifique. C’est ce moment où l’exigence de composition, d’écriture, etc., est comprise par tout le monde ; elle écrase tout le monde. On écoute des choses un peu plus profondes, comme Suicide ou le Velvet, mais on aime beaucoup les choses très commerciales, comme Elvis. Globalement, nos influences c’est de la musique qui marche. Mais on n’est pas non plus dans une démarche cynique sur le plan de la composition, on ne se dit pas « Il faut qu’il y ait ci et ça… » pour que ça marche. On est plus sincère que ça 

    B : Tu parles souvent du morceau Anne-Sophie [issu du 1er album « A 71 »] dans cette catégorie de morceaux qui doivent être des tubes.
    JF : Oui c’est exact. Mais parfois cela vient par hasard… Prenez Charlie Rich par exemple, quand il a fait son premier énorme tube The Most Beautiful Girl, il avait déjà des cheveux blancs… En ce qui nous concerne, on arrive à durer, à sortir un troisième album. On a gagné un certain respect. C’est déjà pas mal, même si c’est vrai qu’on aimerait bien que ça aille un peu plus loin.

    G : D’où le fait que dans le dernier album il y a un côté plus pop  ?
    JF : Il y a cette impression parce que les chansons sont meilleures que les dans deux premiers albums, tout simplement ! C’est comme pour les Beatles par exemple : il y a des chansons bizarres que j’aime bien, mais je préférerai toujours leurs énormes tubes, qui sont des morceaux exigeants et qui parlent à tout le monde en même temps.

    G : Coup de foudre à l’envers pourrait être un tube.
    JF : Ça aurait été un tube en 1972, mais je ne sais pas si ce morceau est adapté au monde d’aujourd’hui (rires). On ne maitrise pas les codes de productions de la musique actuelle. On fait ce qu’on aime faire, à partir de ce qu’on aime écouter.

    B : Vous pensez qu’il y a une demande particulière du public pour un groupe comme Mustang ?
    JF : Oui probablement. Je pense aussi qu’on a toujours été tout seul dans notre registre : chansons influencées par le rock’n’roll, le rhythm and blues, en français. Je pense qu’on est toujours les seuls.

    G : Dans l’esprit, davantage que dans la musique évidemment, Mustang me fait penser aux Who.
    JF : J’adore les Who. On adore les mods, parce qu’on adore la soul… Peut-être que l’influence des Who se retrouve surtout sur le deuxième album, « Tabou » : l’énergie et les mélodies. Peut-être sur les paroles aussi, plus personnelles. Jan Ghazi, notre ancien producteur, est un ancien néo-mod des années 80, il nous avait logiquement un peu poussés vers cela…

    G : Et vous avez envie de sortir de la chanson pop ou pas ? Aller sur des choses plus psychés ?
    JF : Je ne sais pas. On l’a fait avec certains morceaux. Mais notre tendance naturelle est tout de même d’écrire des chansons de trois minutes, avec des couplets, des ponts et des refrains. On est tous d’accord sur cela dans le groupe, on a la même vision des choses. Nos albums restent des collections de chansons. Après tu peux arranger certaines chansons de manière un peu psychédélique. Prenez Strawberry Fields, c’est une super chanson, à la sauce psyché…

    B : On a aussi évoqué les Who car ils avaient fait une reprise de Summertime Blues d’Eddie Cochran. On imagine que ce dernier est une grande influence.
    JF : Pas tant que ça en fait ! Evidemment, Cochran fait partie d’une époque que j’aime bien, mais c’est celui que j’aime le moins. Attention : il a un talent fou, il chante très bien et joue incroyablement de la guitare, mais ce n’est pas un type qui m’émeut. Je trouve que c’était original, je pense qu’il aurait fait de superbes choses s’il avait vécu plus longtemps [Eddie Cochran est mort à 21 ans dans un accident de voitures]. J’écoute beaucoup plus Buddy Holly qu’Eddie Cochran à vrai dire, je le trouve plus brillant. C’est fabuleux Buddy Holly ; les chansons étaient très en avance sur leur temps. Ses morceaux me touchent beaucoup.

    B : Comment en êtes-vous arrivés à ces références pas forcément évidentes au début des années 2000 ?
    JF : Nirvana est le premier groupe qu’on a vraiment écouté. Dans ses interviews, Kurt Cobain ne cessait de parler de la simplicité, du punk, etc. On s’est intéressé au punk, des chansons courtes, efficaces. De fil en aiguille, on a écouté les Stooges, qui parlaient pas mal de Little Richard et Jerry Lewis. On allait à la médiathèque pour emprunter des CD de Gene Vincent, de Buddy Holly, d’Elvis. Nos influences ne viennent pas du tout de nos familles. C’est même plutôt une chance, on avait l’impression de découvrir un truc ! J’étais persuadé d’être le seul mec au monde à écouter Roy Orbison, alors qu’en fait il a vendu des millions de disques ! Un pote nous avait fait écouter un vinyle de son père : c’était un live de Jerry Lee Lewis à Hambourg… C’est le premier truc rock’n’roll qu’on a écouté, dans le sens sauvage, mais simple aussi. Avec Buddy Holly, Jerry Lee Lewis, tu arrives à comprendre comment sont faites les chansons, et petit à petit, tu intègres les évolutions…

    B : Tout cela s’est déroulé à Clermont, la ville d’origine de tous les membres de Mustang. Tu peux nous parler un peu de la scène musicale clermontoise ?
    JF : Elue capitale du rock en 2008 ! Il y avait bien entendu un microcosme de musiciens, de bars ; dans une petite ville ça peut suffire à créer quelque chose. Il y avait beaucoup de groupes de garage moderne, un peu bourrins, influencés par Lords of Altamont par exemple, ou des groupes suédois comme The Hellacopters. Nous on était un peu à côté de ça !

    B : Votre premier morceau ?
    JF : Ce devait être En Arrière-En Avant ou Je m’emmerde ; j’avais 16 ou 17 ans. Je venais de commencer la guitare, et j’ai écrit des morceaux tout de suite, j’étais très présomptueux (rires) ! Après, j’ai toujours du mal à improviser un solo ; les seuls solos que je fais sont en général écrits. On a trouvé dans le rock 50's une façon plus excitante de jouer, par rapport aux gros accords barrés de la fin des années 90. Ceci dit j’ai toujours été beaucoup plus obsédé par le fait de bien chanter que de jouer de la guitare !

    B : Les prochaines échéances pour Mustang ?
    JF : On sera le samedi 07 juin à Angers, au Chabada. Et la vraie tournée commence en septembre.

    G : Comment organises-tu ton temps, entre Mustang et ton duo avec Jo Wedin ?
    JF : Pour le moment, on n’est pas surbookés ! C’était plus serré quand on enregistrait l’album. Le problème vient plutôt du fait qu’on sort trop ! Ce qui est cool aussi, c’est qu’il n’y a pas de concurrence entre ces deux projets.

    B & G : Pour finir, un petit clin d’œil à Marc Desse : comment as-tu trouvé le festival qu’il a organisé à Villejuif le dimanche 4 mai ?
    JF : Le festival Passer le Périph' a été une superbe initiative de Marc. On se connait tous, il y avait une super ambiance, bien qu’il n’y ait pas de cohérence musicale entre tous les groupes qui jouaient ce jour-là. Il n’y a pas de courant précis, si ce n’est l’idée de faire des chansons mélodiques en français, plus pop peut-être, l’axe est ici je pense.

    B & G : Dans la nouvelle scène pop française, même si elle est très éclatée, il y a quelque chose de commun : des influences américaines ou anglaises assumée, des textes en français.
    JF : Oui et il y a un appétit pour ce mouvement à l’étranger je pense. Les gens aiment bien la sonorité, même s’ils ne comprennent rien. Ça peut toucher malgré tout, le français fait rêver ! Après il ne faut pas non plus donner dans le cliché et se balader en béret (rires) !


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