• Interview de Maud Octallinn (China, le 21 janvier 2016).

    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Photos d'Olivier REBECQ.

    Interview de Maud Octallinn, 21 janvier 2016

    RETOUR SUR LE CONCERT DE MAUD OCTALLINN AUX TROIS BAUDETS [LUNDI 18 JANVIER]

    Baptiste : Très bon concert aux Trois Baudets, on sent que tu as beaucoup progressé et que ta palette s'est considérablement élargie, et pas seulement car tu as joué en formation complète (piano, soubassophone, trombone, batterie et basse) ...

    Maud Octallinn : C'est vrai que j'étais un peu plus à l'aise qu'à mon premier concert dans cette même salle (en mars 2015, à l'occasion d'une soirée Klaxon, en duo avec mon batteur). Non seulement grâce à mes musiciens, mais aussi grâce au public, que j'ai senti plus réceptif. Ce concert m'a fait avancer d'un grand pas, je crois.

    B&G : Sur la scène des Trois Baudets, tu évoquais une « soirée Ratés du Coeur », et tu te décris souvent comme une « crooneuse ratée »… Tu es la Jean-Claude Dusse de la chanson ? 

    MO : Je n'ai jamais vu « Les bronzés font du ski ». Ma vie sentimentale n'est qu'une succession de ratages incroyables. Et plus ça vient, moins ça s'arrange, mais tout cela me fait beaucoup rire. J'essaie, dans la vie comme dans mes chansons, de rire de tout, et surtout de moi-même. Comme je l'explique souvent aux personnes m'imaginant pessimiste, « rater » ce n'est pas échouer, bien au contraire, c'est se casser un peu la gueule pour comprendre ses faiblesses et faire mieux par la suite. Mon ratage à moi, c'est la résilience du cœur. J'agis parfois sans trop réfléchir (mon côté bulldozer), alors je me casse souvent la gueule, c'est normal. Là par exemple, je viens d'arrêter mon job pourtant intéressant pour me consacrer à la musique et à l'écriture... La peur de ne pas réussir à subvenir à mes besoins me paralyse. La scène me terrifie. Le regard et les oreilles des autres ? Quelle horreur. Sur scène, c'est plus que du trac, je traverse de vraies crises existentielles, je me dis « mais qu'est-ce-que je fous là, qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ? ». Ces petits mélodrames très intimes, je les transforme comme je peux, tantôt en anecdotes que je raconte au public entre les morceaux, tantôt en sourires gênés. Je suis sans doute un peu maso. Ou lucide, car il est évident qu'on avance mieux dans l'inconfort.

    B&G : Pourquoi ne pas avoir joué Super fière sur mon bulldozer aux Trois Baudets le 18 janvier dernier ?

    MO : Je l'avais prévue en rappel, mais nous avons été contraints de jouer 30 minutes et pas une de plus. J'ai conçu ce set pour me donner l'occasion d'expérimenter de nouvelles choses avec mes musiciens. C'était seulement notre deuxième concert en quatuor. Il y en aura d'autres, mais pour des raisons purement pratiques, beaucoup de concerts solo m'attendent. J'ai du coup opté pour La joie seule en morceau solo de milieu de set, car elle trouvait davantage sa place au sein des autres morceaux de ce set, et non pour Super fière sur mon bulldozer, qui est pourtant le titre qui m'identifie le plus depuis le début de ce projet (notamment grâce à sa sortie sur le Volume 5 des compilations La Souterraine). Et pour cause, c'est la première chanson que j'ai composée en 2014, quand j'ai décidé de faire de la musique seule. Avant cela, j'ai joué pendant quelques années dans un groupe de post-jaijamaissuquoi (folk ?) : aventure musicale et humaine très formatrice. Cette chanson incarne beaucoup plus qu'un simple désir de vengeance suite à une rupture sentimentale. En 2014, j'ai vécu une révolution intérieure : j'ai commencé à faire le deuil des modèles familiaux et sociaux que je fantasmais depuis mon enfance et à accepter ma marginalité. Monter sur un bulldozer, c'était mon moyen bien à moi de prendre de la hauteur et de surmonter cet état de profonde tristesse dans lequel j'étais. Dans mon imaginaire, il s'agit en vérité d'un tracteur, et plus particulièrement du tracteur rouge de mon grand-père, que j'ai beaucoup conduit quand j'étais gamine. Mais comme souvent quand on écrit et compose simultanément (c'est comme cela que je procède la plupart du temps), on délaisse les mots du réel au profit de mots choisis (mais pas nécessairement jolis) pour leur sonorité et leur couleur. Les mots ont plusieurs dimensions dans ma tête, je ne les choisis pas par hasard.

    UNE APPROCHE DE LA MUSIQUE A LA FOIS CANDIDE ET AMBITIEUSE

    B&G : Parle-nous de ton parcours maintenant, les étapes qui ont mené à ce que tu te lances en solo.

    J'ai passé une partie de mon enfance dans le Sud de la Champagne (Engente, 30 habitants, des vignes, des forêts, des chèvres et du fromage), puis une autre dans le Nord, à Reims (une cathédrale impressionnante). Dans le Sud, il n'y avait rien pour les oreilles : pas de télé, pas de radio, pas de magnétophone. Mais il y avait ma grand-mère, perchée sur son piano désaccordé, qui préparait les messes en remaniant des chants liturgiques à sa sauce et qui dirigeait des chorales d'écoliers en chantant à tue-tête un répertoire très éclectique de chansons francophones. Alors je l'imitais, sans doute, en chantant mes propres comptines sur ce piano qu'elle finit par m'offrir avant tout pour s'en débarrasser. Il y avait aussi une école de musique, avec un professeur de piano patient au nom floral, Monsieur Violette. Une fois dans le Nord, sur les conseils de ce Monsieur Violette, ma mère m'inscrit au Conservatoire. Les professeurs sont moins patients, à l'exception d'un : Monsieur Eberlé, qui anime « l'atelier chanson » et qui m'incite tout d'abord à m'accompagner au piano tout en chantant (du Brassens, du Ferré et autres grands classiques), puis à jouer dans des bistrots. Je quitte le conservatoire à 16 ans, juste avant de ne plus pouvoir composer qu'avec le cœur. C'est une fois que je n'étudie plus la musique que je commence à m'y intéresser sérieusement. Je découvre le jazz, la musique progressive et les musiques du monde en écoutant enfin des disques (Keith Jarett, Chick Corea, Bobby McFerrin, Avishai Cohen, Joni Mitchell, Frank Zappa, Pink Floyd, Supertramp, Nino Ferrer, Ali Farka Touré, ...) et en jouant beaucoup de piano. Je débarque à Paris à 22 ans pour achever mes études de Lettres. Je ponds un mémoire sur la mise en musique post-romantique du mythe de Don Quichotte, mais j'abandonne la recherche, je préfère gagner ma vie rapidement et faire de la musique. Je me retrouve pianiste/choriste/parolière (en anglais) dans le groupe dont je parlais tout à l'heure. Je déteste la scène, mais je sens que j'apprends beaucoup, alors je me force. Je découvre la musique indé anglophone, des nouveaux héros entrent dans mes oreilles : Bill Callahan, Low, DM Stith, Espers, Sigur Ros, Phosphorescent, Joanna Newsom, Soap & Skin, Josephine Foster, Lhasa... Parallèlement à ce projet, je continue de mettre en musique mes textes, comme je le fais depuis que je suis enfant, sauf que mes textes ne ressemblent plus à des comptines, mais à de vraies chansons. À 26 ans, je quitte le groupe pour me consacrer à ma musique, sous le nom de Maud Octallinn (= Cantillon, mon vrai nom, mais dans le bon ordre, celui que j'ai choisi). J'ai commencé à utiliser cet anagramme très jeune, pour signer mes premiers écrits (des poèmes et des nouvelles).

    B&G : Quel rôle a joué ta mère dans ton éducation musicale et la construction de ta sensibilité ?

    MO : Dans ma famille maternelle, la pratique du piano se transmet de mère en fille depuis plusieurs générations, mais ni ma grand-mère ni ma mère n'ont eu la chance d'étudier la musique autant que moi. Je crois que c'est ce piano désaccordé et cette guitare à trois cordes sur laquelle ma mère puis moi avons appris à jouer et à chanter qui m'ont rendue un peu toctoc. J'aime les instruments abîmés, qui couinent, pleurent ou murmurent des histoires. Mon titre expérimental Resucito est un hommage à cet héritage maternel lo-fi (et mystique).

    B&G : Passons au présent ! En 2014, tu sors ton premier EP de trois titres, « Fête ratée »…

    MO : Oui, été 2014, le moral en berne, je joue mes nouveaux morceaux à mon ami Igor Moreno (producteur et ingé son de profession), qui m'aide à les enregistrer dans son studio, sans prétention, juste clavier/voix, pour avoir une trace. Après hésitation, je décide de mettre ces trois titres en ligne sur Bandcamp. C'est là que les ennuis ont commencé... La Souterraine en pince pour mon Bulldozer et me propose un premier concert à l'Olympic café. Hors de question de jouer seule, alors je cherche un batteur pour faire du bruit et prendre beaucoup de place sur scène. Par chance, je tombe sur Corentin (beau, gentil et doué), qui m'accompagne depuis maintenant plus d'un an. La mayonnaise prend bien, et hop, on monte notre premier set en duo en quelques semaines !

    Interview de Maud Octallinn, 21 janvier 2016

    UN UNIVERS MUSICAL SINGULIER-PLURIEL

    B&G : Ta voix et ta manière de chanter sont très singulières. Tu avais cette volonté de te distinguer ?

    MO : Peut-être parce que je n'ai jamais pris de cours de chant ? Je respire rarement au bon moment et ma prononciation laisse à désirer... En revanche, j'ai appris à déchiffrer des partitions pour piano en jouant une main et en chantant l'autre, c'est peut-être pour cela que je considère ma voix comme un instrument complice et parfois même comme une main droite supplémentaire. Je sens les limites de cette approche plus « jazz » que « chanson française ». J'ai conscience de placer l'auditeur dans l'inconfort et de le perdre avec certaines envolées lyriques.

    B&G : L'ambiance sonore de certains morceaux est également très particulière : on pourrait presque parler de variations moyenâgeuses sur certains morceaux...

    MO : Oui, vous n'êtes pas les premiers à faire ce lien. Je me suis beaucoup intéressée au chant grégorien et à la littérature médiévale. Il y a peu de modulations dans ma musique et mes compositions partent souvent d'un bourdon, que je m'amuse à triturer vers l'atonalité. Les compositeurs classiques que j'ai étudiés m'ont sans doute influencée : la seconde école de Vienne (Schöneberg, Webern), le club des 6 (Poulenc, Milhaud), et mes amours aussi : Mahler, Stravinsky, Debussy, Satie, Ravel, Messiaen, Arvo Pärt, Moondog... J'ai découvert la musique populaire sur le tard, finalement, et je crois que ça a foutu un gros bazar dans ma tête. Mais je ne sais pas si ces explications sont pertinentes, car aujourd'hui j'accorde tellement d'importance aux dimensions narratives et scéniques de mes morceaux et je réfléchis si peu au style que je souhaite pratiquer...

    B&G : Dans l'émission de France Culture à laquelle tu as participé, l'animatrice termine l'émission en disant que tu es la Nina Hagen de la Chanson français (http://www.franceculture.fr/emissions/les-carnets-de-la-creation/maud-octallinn-chanteuse), qu'en penses-tu ? 

    MO : J'ai ri parce que je ne la connaissais pas ! Des proches ont trouvé cette comparaison intéressante : une personnalité excentrique mais très saine d'esprit, qui en fait des caisses tout en s'excusant d'exister, une insoumise mystique, une impudique au grand jardin secret... Oui, il y a un peu de ça !

    B&G : Qu'est-ce-que tu écoutes en ce moment ?

    MO : Depuis la sortie de mon EP en 2014, j'essaie d'écouter tout ce qui se fait en matière de musique chantée en français, histoire de rattraper mon retard. En un an, j'ai découvert 50 ans de musique que je n'avais jamais écoutée de ma vie. J'ai eu la chance, à 28 ans, de découvrir Barbara, Gérard Manset, Dick Annegarn... Les compilations et les Mostla Tape La Souterraine sont une vraie mine d'or et m'aident beaucoup dans ce travail de recherche et d'écoute active. Mes goûts sont très éclectiques, y compris au sein même de cette niche francophone : j'écoute avec tout autant de plaisir les futuristes d'Aquaserge, les punks isolés (Fantôme, Le Bâtiment, Gontard !) les crooneurs plus identifiés (Bertrand Belin, Babx), les chamans du Saule (Philippe Crab, Antoine Loyer), les génies des mots et des planches (Mathieu Boogaerts, Fantazio, Nicolas Jules)... Et j'en découvre avec joie quasi quotidiennement.

    Interview de Maud Octallinn, 21 janvier 2016

    INTERVIEW « DERNIER COUP »

    B&G : Dernier coup de coeur ?

    MO : Je tombe très souvent amoureuse d'instruments de musique. Les derniers en date : un Beltuna diatonique, un piano bastringue nommé Coeury Paris, un Dulcitone tout cassé, un Petrof à grande queue rencontré à Prague, ou encore ma Telecaster déglinguée. Ça peut paraître matérialiste, mais il y a du vrai sentiment là-dedans.

    B&G : Dernier coup de rouge ?

    MO : Un Arbois rubis. Seule. Enfin presque, en compagnie d'une tartiflette maison, quoi. Le fromage, c'est important.

    B&G : Dernier coup de blues ?

    MO : J'ai récemment écouté toute la discographie de Nina Simone… Comment jouer du piano après cela ?

    Setlist du concert de Maud Octallinn aux Trois Baudets, le 18 janvier 2016 : J'aurais voulu aller au zoo (piano/batterie) > Prince FLAT (piano/batterie) > La soupe de ma maman (piano/batterie/soubassophone/trombone) > À cheval sur le monde rêvé sauvage (piano/batterie/basse/trombone) > La joie seule (piano solo + danseuses) > Pourquoi je chavire (piano/batterie/soubassophone/trombone) > De ma cabane (piano/guitare électrique/soubassophone/trombone + lampe torche et extrait de ma bible personnelle VIVRE) > Je suis une grosse flaque (piano/batterie/basse/trombone)

    Facebook : https://www.facebook.com/octallinn/  

    Bandcamp : https://maudoctallinn.bandcamp.com/ 


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  • Interview de Juliette Heilmann et Paul Braillard du groupe X&Y, pour la sortie de leur premier EP "The Miracle Of ..."
    12 novembre 2015 - Pop In.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.
    Photos d'Olivier REBECQ.

    Interview de X&Y, 12 novembre 2015

    Baptiste & Gérald : Racontez-nous un peu vos histoires personnelles et les moments charnières qui vous ont donné envie de faire la musique et de créer ce groupe X&Y...
    Paul Braillard (guitare, chant) : Nous sommes de deux générations différentes, Juliette et moi, mais nous avons commencé à faire sérieusement de la musique au même moment, il y a six ans. Nous nous sommes rencontrés via un groupe de reprises qui d'ailleurs a fini par s'appeler « Y » [à prononcer en anglais], ce qui donne un indice sur le nom du groupe aujourd'hui. Juliette faisait déjà partie de ce projet musical le jour où j'ai été auditionné pour en devenir le chanteur. Je me souviens que j'avais dû chanter Crying Lightning des Artic Monkeys. Reptilia des Strokes aussi. C'était très pop rock. Plus tard, je me souviens que Juliette m'a envoyé un message dans lequel elle m'annonçait qu'on allait reprendre Paranoid Android de Radiohead. C'était un pari osé…
    Juliette Heilmann (guitare) : … Mais on a réussi à sortir quelque chose qui nous ressemblait! (rires)
    PB : A cette époque on aimait bien revisiter des classiques, utiliser de l'existant comme un point de départ. On avait complètement déstructuré Smells Like Teen Spirit de Nirvana avec des accords complètement barrés…
    JH : Oui je me souviens surtout du final : tu tapais sur le clavier comme un fou, c'était sympa. Le morceau montait tout doucement en intensité, et à la fin c'était une grande explosion. L'idée, en tout cas pour certains morceaux, c'était vraiment de déconstruire la chanson pour se l'approprier.
    PB : Bref on faisait des reprises, mais, mine de rien, on s'essayait déjà à l'arrangement et la compo. Au bout de 2 ans, le groupe a fini par se séparer, justement quand on a voulu se concentrer sur la composition. On s'est retrouvés juste tous les deux avec Juliette. On a écrit pas mal de morceaux qu'on jouait en duo acoustique dans des bars pendant 2 ans encore… Et puis l'an dernier, on s'est dit que ces chansons méritaient d'être portées par un groupe.
    JH : Quand j'ai rencontré Paul j'étais à l'American School of Modern Music. Paul se formait dans son coin, en autodidacte, puis il a rejoint cette école. C'est un établissement très axé sur le jazz, donc pas forcément notre domaine de prédilection, mais qui sensibilise véritablement à l'improvisation et à l'arrangement, et qui a aussi le mérite de te faire interagir avec beaucoup de musiciens. On a tout naturellement rencontré deux personnes avec lesquelles on s’entendait bien, et qui ont su mettre leur patte dans le projet, avec des univers différents mais complémentaires : Pablo Ramirez à la batterie, et Sacha Leroy à la basse. Grâce à eux, le puzzle est complet maintenant!
    Pour l'histoire du nom de groupe… Quand on s'était retrouvé à deux, on voulait trouver un nom qui reprenait l'idée "Y" mais en évoquant notre duo, du coup « X&Y » nous est vite apparu comme une évidence. On aimait bien comment ça sonnait. On peut y voir ce qu'on veut, un homme - une femme, deux générations, les chromosomes, le début (ou la fin?) d'une histoire… Même si nous sommes quatre désormais on garde ce nom, on s'y est habitué!

    B&G : Et justement, il faut prononcer « X&Y » à l'anglaise. Cela peut se justifier par le fait que les paroles de vos morceaux sont en anglais. L'écriture en français vous intéresse-t-elle moins ?
    PB : Je n'ai pas vraiment choisi d'écrire les textes en anglais à vrai dire… Je ne me suis jamais posé la question : quand j'écrivais des paroles, c'était l'anglais qui me venait immédiatement. Comment l'expliquer ? 95 % de ce que j'écoute est en anglais. Ceci dit une petite partie de moi a envie d'écrire en français. Mais cela viendra à un moment sans que la question n'ait à se poser. Cela se fera aussi naturellement, je l'espère, que l'écriture en anglais aujourd'hui. J'ai quelques chansons en français sous le coude, mais elles ne correspondent pas à X&Y.

    B&G : Quels ont été vos premiers émois musicaux, et les groupes qui vous ont le plus influencés ?
    JH : Mon premier émoi significatif, c'est sans aucun doute Pink Floyd. Quand j'étais ado, ils m'ont littéralement obsédée : c'est le premier groupe dont j'ai écouté tous les albums, en long, en large et en travers ! C'est venu en même temps que mes premiers essais à la guitare. Ce qui me marquait le plus c'était leur son global, et en particulier celui de Gilmour. Ils pouvaient composer des mélodies très faciles à entendre et à retenir et en même temps s'évader dans des parties instrumentales plus osées et plus fouillées. Cet équilibre est une chose que j'admire. Et puis, en grandissant, je me suis rapproché des 90’s et des années 2000 : de Nirvana aux Arctic Monkeys, de Portishead à Radiohead. Paul m'a aussi fait découvrir la discographie de Blur que je connaissais peu, et d'autres groupes britpop comme Pulp.
    PB : Les chansons « triptyques » nous fascinent en fait. On avait tendance à donner un peu trop là-dedans au début : on commençait avec une mélodie, et puis le morceau pouvait partir très loin, parfois même un peu dans tous les sens. On a cadré nos compositions avec le temps, en essayant de trouver l'équilibre entre notre goût pour la musique efficace, qui parle à tout le monde, et l'envie de s'évader à travers des parties plus planantes… Il y a aussi des groupes plus actuels, qu'on admire beaucoup, par exemple The Antlers, qui possède à la fois cette ambivalence pop et musique plus planante. On suit beaucoup aussi ce qui se passe sur la scène post-rock : Godspeed You! Black Emperor par exemple, qui arrive très bien à imposer une ambiance. Leur musique nous parle énormément. On peut se retrouver à jammer à la maison dans cet esprit-là…
    JH : … le même accord qui tourne, et qui va finalement prendre une ampleur inédite. On peut se permettre ce genre de délire quand on veut, à n'importe quelle heure, sans déranger personne car nous avons une petite pièce insonorisée à domicile, avec tous nos instruments.

    G : L'EP que vous venez de sortir, « The Miracle Of... » pourrait se découper en deux parties : on retrouve l'influence Pink Floyd pour les deux premiers morceaux de votre EP, et l'influence Radiohead pour les deux derniers…
    JH : Cela me paraît cohérent de voir cet EP "coupé" en deux. Je dirais tout de même qu'il y a une influence Arctic Monkeys sur les deux premiers morceaux.
    PB : Le troisième morceau, The Right Way, est une de nos compositions les plus anciennes, d'où l'influence évidente de Radiohead. Et sur le dernier morceau, Breath in/out, on peut aussi évoquer le groupe de rock américain Spain si l'on veut trouver des ressemblances… En tout cas c'était la couleur que je recherchais quand j'ai commencé à écrire la chanson, à la limite du jazz club, avec des sons un peu traînants. On imagine bien un rideau de velours…

    G : Le groupe Spain a joué ici, au Pop In ...
    JH : On a joué dans une salle où Spain a joué ? Trop classe !
    PB : Ce morceau me fait aussi penser à Low, dans le genre slowcore.

    B&G : En fait une musique très simple, très peu de notes. Basse, batterie, chant, guitare avec un minimum de notes et d'effets. Rythme assez lent, bien deep !
    PB : Oui… Globalement ce premier EP a un côté catchy assumé, mais le second tirera plus sur nos influences sub, avec des ambiances parfois plus complexes.

    B&G : Le choix des chansons, dans la mesure où il s'agit de votre premier EP, n'est évidemment pas dû au hasard. Pouvez-vous nous dire ce que chacune représente pour vous ?
    PB : On voulait avoir un panel assez large même si ce sont les chansons les plus "simples" de notre répertoire: l'EP commence avec The Miracle Of Hell, qui est plutôt rock, tout comme Everything Will Be Alright, plus pop encore. Pour Miracle, elle est apparue il y a un ou deux ans, alors qu'on avait suffisamment de morceaux. Mais on voulait ce morceau efficace. On a décidé de se bloquer une nuit pour l'écrire. La plus longue de l'année, celle du 21 décembre. On a commencé à bosser au coucher du soleil et on a arrêté quand il s'est levé ! On s'était fixé ce challenge et voilà Miracle était là. Pour ce qui est du reste du disque c'est une sorte de descente, un retour au calme en quelque sorte.
    JH : Breath In/Out le dernier morceau est celui qui a provoqué, selon moi, la meilleure expérience lors de l'enregistrement : on l'a fait en live. A l'écoute, je pense que cela s'entend : on est davantage en osmose, on s'écoute plus les uns les autres. Il y avait aussi une part d'inconnu qui m'a beaucoup plu. J'aimerais bien qu'on laisse plus de place à ce type d'enregistrement pour le prochain CD, quitte à passer un peu plus de temps en studio : on se donne la chance d'avoir des imprévus.

    Interview de X&Y, 12 novembre 2015

    B&G : Quel est votre programme pour cette fin d'année 2015 ? On pourra venir vous voir en concert ?
    PB : On a fait quelques changements au niveau de la line-up, la personne qui assurait la deuxième guitare a quitté le groupe. Du coup, je récupère une guitare, et depuis notre dernier live, un mois en gros, nous retravaillons les arrangements en groupe. L'idée est de redéfinir un peu le son du live et de revenir à une formation classique rock : guitares, basse, batterie, chant. On va éprouver ce nouveau schéma début décembre avec deux concerts dans le Nord-Est, à Sedan au Ba-Rock Café le 5 décembre, puis le 6 décembre au No Man's Land à Volmerange-Les-Mines, près du Luxembourg. On va reprendre les dates parisiennes en janvier 2016, et repartir au plus tôt en studio pour enregistrer ce qu'on appelle la deuxième partie de l'album.
    JH : Je ne sais pas si on appellera cette deuxième publication premier album ou deuxième EP, car elle comportera huit ou neuf chansons… Peut-être un long EP !
    PB : On prévoit aussi une petite surprise, sous forme de clip.
    JH : On cherche aussi des festivals où on pourrait jouer l'été prochain, ce serait super de tourner pendant deux à trois semaines sans interruption.

    B&G : Qu'est-ce-que vous écoutez en ce moment ?
    JH : J'ai découvert récemment un groupe un peu math rock, Battles, où on retrouve des métriques un peu bizarres. Mogwai aussi, une musique bien planante. J'écoute le dernier Villagers en boucle. Et, pour les citer encore : Godspeed You !
    PB : J'ai adoré le dernier Blur, même s'ils ont toujours cet écueil de faire des albums un poil trop longs à mon goût. Plus récemment, j'écoute pas mal de groupes « ambient », comme A Winged Victory For The Sullen, Grouper, Clem Leek… J'écoute aussi pas mal John Grant. Et Tame Impala, même si je me lasse un petit peu du dernier album finalement...
    JH : J'adore Tame Impala, mais sur  « Currents », il y a un truc qui me gêne, sans trop savoir quoi. Peut-être ce virage électro qui leur enlève quelque chose selon moi…

    B&G : On arrive à la traditionnelle interview "Dernier Coup", on commence avec votre dernier coup de cœur ?
    JH : Je suis allée dans un super restaurant avec une copine. Le resto s'appelle Puce et se trouve à Pigalle. On s'est régalé.
    PB : Le triplé de Lacazette contre Saint-É.

    B&G : Dernier coup dur ?
    JH : Notre appart' est complètement mal rangé et sale, j'en ai repris conscience ce matin… En même temps, c'est pas vraiment le dernier coup dur, ça fait longtemps que c'est comme ça ! (rires)
    PB : Pareil. Y'a des cartons partout. On a reçu du nouveau matériel de musique…

    B&G : Dernier coup de gueule ?
    JH : « Il faut ranger cet appart' ! », c'est lié au coup dur !

    B&G : Dernier coup de rouge ?
    JH : Hier soir. Un cubi Monoprix, du Corbières. On le conseille !

    Prochain concert de X&Y le jeudi 7 janvier à l'Olympic Café (20, rue Léon, 75018 Paris). Toutes les infos sont disponibles sur l'événement Facebook suivant : https://www.facebook.com/events/1088647914502871/

    Pour suivre les actualités de X&Y:
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    Pour commander le CD de leur premier EP, ou le télécharger en mp3 :
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  • Interview croisée de Dorothée Hannequin et Laurent Blot, de The Rodeo.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.
    Photos d'Olivier REBECQ.

    Bien décidée à poursuivre son entreprise de mélange des genres, Dorothée Hannequin a emmené son dernier LP “La Musica Del Diavolo” (2015) au carrefour de sentiers folk et soul, rappelant ses influences américaines originelles, mais aussi pop et indé. C'est d'ailleurs sur ce dernier effort que se distingue la griffe de l'incisif guitariste Laurent Blot. Contactés suite au concert de The Rodeo au Petit Bain le 3 novembre dernier, je les ai retrouvés devant Record Station, disquaire bien connu des passionnés de vinyles (cf. notre interview de Quentin, de Record Station), pour une hivernale interview croisée, révélant leurs influences musicales convergentes.

    Interview de The Rodeo, 27 novembre 2015

    HOPPER ET ELDIA, LA FLÈCHE D'OR
    Baptiste et Gérald : Le premier EP de The Rodeo « My First EP » remonte à 2008, mais on imagine que vous vous connaissez depuis un peu plus longtemps. Vous vous souvenez de votre rencontre ?
    Laurent Blot : Je me souviens très bien de la première fois que j'ai vu Dorothée, c'était lors d'un concert avec son ancien groupe, Hopper. Mais c'est quelque temps après seulement que l'on a fait connaissance.
    Dorothée Hannequin : C'était à la grande période de la Flèche d'Or, vers 2004-2005 : des concerts gratuits tous les soirs, dont quelques groupes qui cartonnaient.
    LB : Pour moi c'est vraiment la dernière grande époque de concerts rock à Paris.
    DH : Avec nos groupes respectifs, Hopper et ELDIA, on a dû y jouer une bonne dizaine de fois, c'est là que nous sommes devenus potes.

    THE RODEO
    B&G : Dorothée, Laurent joue avec toi dans The Rodeo, comment est-il arrivé dans le groupe ?
    DH : Quand j'ai commencé The Rodeo, j'étais toute seule avec ma guitare, et un musicien m'accompagnait au violon. Il faisait également un peu de charango et de ukulélé. Et puis j'ai ajouté une guitare dans le groupe, c'est à ce moment que j'ai sollicité Laurent, pour un remplacement à la base. C'est aussi et surtout une histoire d'amitié.
    B&G : En ce qui concerne la composition et l'écriture dans The Rodeo, comment fonctionnez-vous ?
    DH : C'est moi qui compose et qui écris tout, depuis le début. Le premier album, « Music Maelström » (2011), est folk, tandis que le second, « La Musica Del Diavolo » (2015), est plus rock. C'est sur ce dernier LP qu'on va trouver la patte de Laurent.
    LB : Sur le dernier LP, il y a plusieurs titres qui ont été enregistrés il y a pas mal de temps, et qu'on avait déjà joués en live à plusieurs reprises. Il y a, bien entendu, des morceaux que j'apprécie tout particulièrement et que j'aime vraiment jouer en live, comme Odyssey. Peut-être que je suis moins à l'aise sur les morceaux les plus lents, c'est probablement dû au fait qu'en concert j'ai envie de voir Dorothée en Tina Turner (rires), à fond dans le morceau, et que quelque chose de dingue se dégage !
    DH : Autre chose sur notre collaboration : j'ai maquetté beaucoup de titres en amont avec Laurent, des titres qu'on avait travaillés ensemble. On a par exemple enregistré le titre Please Don’t Knock At My Door sur le dernier EP, « Tale Of Woe », en trois heures dans le studio de Laurent.
    LB : Idem pour le titre Egyptian Doll sur le dernier LP, on l'a fait en deux heures un soir.
    DH : Ce que j'aime chez Laurent, c'est sa spontanéité. Sans oublier qu'il est capable de jouer de la guitare, de la basse, de la batterie, qu'il sait faire des chœurs… Il sait tout faire ! Ce qui est magique c'est qu'on se lance parfois dans l'écriture d'un morceau, on trouve une idée et au bout de quelques heures sort un truc qui me semble parfait… Je n'aime pas passer des jours et des jours sur un morceau. La spontanéité, car elle ne gomme pas certaines fragilités, donne toujours des résultats assez magiques.

    B&G : Parlons de ton jeu de guitare Laurent. A l'écoute, mais aussi quand on te regarde jouer en live, on pense immédiatement au guitariste de Franz Ferdinand…
    LB : J'accepte ! Je suis évidemment fan du jeu de guitare de Nick McCarthy. Franz Ferdinand fait partie de mes groupes préférés. J'imagine que ça m'a influencé. Je ne suis pas sûr que je jouais comme aujourd'hui avant d'écouter leur premier album… Parmi les guitaristes qui m'inspirent beaucoup, il y a aussi Chuck Berry : des solos inimitables, une série de notes pas forcément gigantesque, mais tellement efficace ! Récemment, j'ai aussi beaucoup écouté la Stax, et notamment leur groupe maison, Booker T. & The MG's , dont le guitariste posait seulement quelques notes, mais toujours celles qu'il fallait… Je pourrais citer également John Lee Hooker. Ou Graham Coxon, dans un certaine mesure : fabuleux guitariste, avec Blur ou en solo il tente beaucoup de sons, qui débouchent sur des mélodies parfois bizarres, mais toujours géniales. Pour finir, il y a un groupe dont les parties de guitare sont tellement intelligentes, c'est The Coral. Je vais les voir à Manchester en avril d'ailleurs.
    DH : Ce qui est dur quand tu es guitariste, c'est de ne pas être trop bavard, de ne pas en faire trop, de ne pas avoir une myriade de pédales d'effets... Il faut savoir laisser des respirations, des espaces pour la musique, ce que Laurent sait parfaitement faire. En ce qui concerne le jeu de guitare, j'aime beaucoup son style très incisif, assez sec.

    B&G : Dorothée, on peut recenser beaucoup d’invités sur ton dernier LP, peux-tu nous parler de l'apport de quelques-uns d'entre eux ?
    DH : Je tiens déjà à dire que ce sont tous des amis musiciens. Il y a par exemple Matt Bauer, qui joue du banjo pour Alela Diane. Il a un vrai savoir-faire sur cet instrument. Je l'ai croisé à peine une fois, et il a collaboré à mon dernier LP à distance. Il m'envoyait des pistes… J'ai aussi « pioché » dans les talents qui m'entourent, tout comme j'ai pu participer aux disques d'autres ; il y a une vraie communauté de musiciens parisiens qui s'entraident autant que possible.
    LB : En ce qui me concerne, parmi les guests du dernier album de The Rodeo, Jean Thévenin m'a beaucoup impressionné. C'est le meilleur batteur de la place, tout simplement ! C'est un surdoué.
    DH : Il est inimitable. Sa touche personnelle est évidente. C'est un vrai artiste.
    LB : La première fois que je l'ai vu jouer en live, c'était pour un concert de Hopper, et je n'ai regardé que lui ! Même dans sa gestuelle il est bluffant, il se démembre sur scène.
    DH : Je pense aussi à David Neerman du groupe Kouyaté-Neerman, qui a joué du vibraphone sur « La Musica Del Diavolo ». Il y a aussi Lidwine, une talentueuse amie harpiste qui est venue jouer sur le titre Inner War. J'aime bien aussi avoir sur mes morceaux des instrus qu'on n'a pas l'habitude d'entendre. Il y aura peut-être de l'accordéon dans le prochain ! J'adorerais aussi ajouter un orchestre symphonique, plein de cuivres, mettre des choristes à gogo, mais cela demande plus de moyens.
    LB : De toute façon, quand ton morceau est bon, tu peux poser n'importe quel instrument dessus.

    Interview de The Rodeo, 27 novembre 2015

    ARIES SUN / GASPARD ROYANT
    B&G : Dorothée tu as joué au Pop In le lundi 23 novembre avec le groupe Aries Sun, ainsi que le 8 décembre à l'International, tu peux nous dire quelques mots sur cette nouvelle formation ?
    DH : Je me suis rendu compte que j'avais pas mal de chansons dans mes valises, mais elles n'auraient pas pu fonctionner avec The Rodeo. C'est surtout ma rencontre avec Michael, un guitariste que je connais du temps de mon groupe qui a conduit à faire ce side project. Il jouait dans le groupe Rodeo Massacre. Il a une réelle identité sonore à la guitare. Aries Sun est aussi composé d'un batteur, Dimitri Dedonder, un bassiste, Benoit Hasboun, qui a joué avec Sheraff et Forever Pavot, et enfin un autre guitariste, Adrien Vernet, du groupe Miaou Miaou The Tiger. En ce qui concerne le style de musique d'Aries Sun, il y a des morceaux qui rappellent les Black Lips, Wavves, ou Best Coast. C'est un peu foutraque, un peu garage et punk. Des morceaux de trois minutes. Je joue du clavier sur trois ou quatre morceaux seulement, sinon je ne fais que chanter. Ça fait du bien de revenir à un projet musical sur lequel on ne se met pas la pression.

    B&G : Et toi Laurent, quelle est ton actualité ?
    LB : On a fini d'enregistrer le deuxième album de Gaspard Royant en septembre dernier, il est au mixage en ce moment. Il sortira en mars 2016 et puis on va repartir en tournée. Ce projet me prend l'essentiel de mon temps.

    INFLUENCES
    B&G : Vous êtes de gros consommateurs de musique ?
    DH : J'écoute beaucoup la web radio Reverberation (http://reverberationradio.com/), elle ne passe que des morceaux que j'aime. Ça va des morceaux soul des 60s, à des titres plus récents. Sinon, je n'achète plus de CDs, seulement des vinyles. Mais il faut le budget et beaucoup de place !
    LB : J'ai un abonnement Spotify, j'utilise cette appli tous les jours, quand je ne suis pas chez moi. J'ai gardé mes CDs, mais ils sont rangés quelque part ! J'ai peu de vinyles des années 90, c'est pour cette période que les CDs me sont utiles. J'écoute peu la radio, seulement pour les infos ! J'ai une petite soixantaine de vinyles, mais ce ne sont que des albums que j'adore.

    B&G : Quelles influences avez-vous en commun ?
    DH : On en partage beaucoup. Le blues et la soul notamment. Marvin Gaye, The Supremes, The Shangri-Las. Tous les Girls Bands des 60s. J'aime la naïveté des paroles, la force des mélodies, à la fois simples et efficaces, les harmonies vocales, le côté désuet, le look des filles de l'époque. Et puis l'avalanche de tubes ! C'est quelque chose qui nous rapproche avec Laurent, on aime les belles mélodies !
    LB : Oui c'est vrai. On ne s'inscrit pas dans une sorte de recherche de la vérité sur la musique. On veut juste faire bouger les gens qui viennent nous voir en concert. On a presque le même âge, on est de la même génération, les bébés des années 90, une période d'ailleurs très foisonnante en termes de courants musicaux...
    DH : … et on a commencé à jouer dans des groupes au même moment. Sans oublier le fait que nos parents écoutaient les Doors et les Pink Floyd. Cela nous rapproche aussi beaucoup, même si cela ne s'entend pas forcément dans ce que l'on fait avec The Rodeo.

    B&G : A l'écoute du premier album de The Rodeo, « Music Maelström » (2011), on note les influences de Johnny Cash, Dolly Parton…
    LB : Je connais moins ce style-là, la folk music et la country music. Dylan c'est très particulier. Et je n'ai jamais vraiment découvert Johnny Cash, je connais sa vie via le film, j'ai vu quelques lives en vidéo… Mais ça ne m'est pas très familier. Mes parents n'écoutaient pas trop cela. En revanche, j'ai écouté en boucle les Beatles quand j'ai commencé à jouer. Leurs morceaux ne me lasseront jamais ! Ce sont les chefs ultimes : le savoir-faire en studio, la composition, les voix, les gueules, les looks.
    DH : J'ai commencé la guitare à 15 ans, et j'ai joué dans Hopper à partir de mes 18 ou 19 ans, dans un style assez énervé (rires). L'aventure a duré neuf ans. A ce moment-là, j'étais plutôt attiré par les Blonde Redhead, Sonic Youth. A la fin de Hopper, j'ai repris ma première guitare, une vieille Ibanez des années 70. Au bout de quelques mois, j'avais écrit quatre titres et j'ai décidé de me lancer en solo. Je suis donc parti sur un style plus épuré, un peu dans le genre anti folk, Jeffrey Lewis, Adam Green [Moldy Peaches].

    B&G : Dans une interview pour Paulette, tu [Dorothée] as déclaré « Il faut du temps pour se décrocher de ses influences », mais est-ce vraiment possible ?
    DH : L'idée était de dire qu'il faut savoir piocher un peu partout, dans tous les styles que tu aimes, et de les mélanger pour fabriquer ta propre identité musicale. Tu ne gommes jamais vraiment tes influences. Il faut en emmagasiner un maximum et savoir ensuite s'en dégager pour créer sa propre patte.
    LB : Je dirais qu'il faut du temps pour se détacher de ce que tu fais, par rapport à l'activité de composition. Il faut du temps pour se dire que ce n'est pas si sérieux. Ce n'est pas si évident de prendre du plaisir quand on fait ce métier. Le business est tout de même très violent. Sachant, c'est ce que j'ai pu constater, que c'est quand tu t'amuses que tu t'appliques le plus.

    B&G : Mustang (cf. notre interview de Mustang), Jo Wedin & Jean Felzine (cf. notre interview de Jo Wedin & Jean Felzine), Gaspard Royant… comment percevez-vous ce regain d'intérêt pour des sonorités et des styles très référencés 60s, mais que vous réussissez à revisiter, pour arriver à un résultat  résolument moderne ?
    DH : C'est un mouvement. Les influences 60s reviennent à la mode, tout comme le chant en français.
    LB : Oui ce sont des cycles. Dans les années 90, peu de temps après Lenny Kravitz il y a eu un retour des années 60-70, pattes d'èph… Après, The Strokes, retour au début des années 80, le cuir, le slim. Franz Ferdinand même période… Le seul truc qui n'a pas fonctionné, pas encore, c'est le retour des années 90…
    DH : Tu veux dire le retour de la dance ? (rires)
    LB : Non, je pense plutôt au grunge ! Il a commencé à revenir, et il est reparti aussi vite !

    Interview de The Rodeo, 27 novembre 2015

    B&G : Dorothée tu évoquais le retour des paroles en français, cela te donne envie de mettre l'anglais de côté ?
    DH : J'ai deux morceaux en français, Le Fantôme de tes Pas, sur l'EP « Tale Of Woe » (2014), et La Notte sur l'EP « Cold Heart » (2012). Il y en aura d'autres sur le prochain LP. J'ai plus de facilités aujourd'hui à écrire en français sur les titres mélancoliques. Je pense aussi qu'il y a un retour, au sein du public, de l'intérêt pour le français. C'est simple : les gens aiment chanter et ils sont très contents de pouvoir le faire en français !
    LB : Pendant plusieurs années, il y a eu la pesanteur de l'influence de Gainsbourg, qui est inimitable et qui chantait en français. Depuis trois ou quatre ans, iI y a malgré tout des groupes qui arrivent à sortir des morceaux excellents, en français. Tu as parlé de Jo Wedin & Jean Felzine, l'EP qu'ils viennent de sortir est vraiment très bon. Joanna chante parfaitement.
    DH : J'ai aussi découvert des musiques grâce à des des films. Par exemple, j'aime beaucoup « The Commitments », un film d'Alan Parker qui date de 1991. C'est l'histoire d'un groupe qui part en tournée, période Thatcher. C'est assez trash. Et les musiques sont tops. Après, j'aime beaucoup les films musicaux, Michel Legrand, Jaques Demy. Et puis des films marrants, genre « Spinal Tap » (1984), « Wayne's World » (1992)…
    LB : Même s'il a assez mal vieilli, je citerais le film « The Doors » (1991). J'ai adoré ce film à l'époque. Val Kilmer était au top ! Et grâce à ma fille de six ans, j'ai redécouvert « The Sound Of Music » [« La Mélodie du bonheur »] (1965). C'est un peu gnangnan, mais le film est tout de même assez dingue !

    B&G : Nous sommes à Record Station, la boutique de vinyles de Quentin. Quels disques avez-vous repérés ?
    DH : The Supremes, « Where Did Our Love Go » (1964), pour les raisons que j'ai données tout à l'heure. T. Rex, « Electric Warrior » (1971) : les mélodies sont incroyables, et j'aime beaucoup les chœurs, des voix très marquées. Et dernier disque, Patti Smith, « Horses » (1975) : j'aime la rage qu'il y a dans cet album, la production est très live, et évidemment j'aime la poétesse.

    LB : Premier disque, « L.A. Woman » (1971) des Doors. J'ai appris à jouer du piano et de la batterie en écoutant ce groupe, quand j'étais ado. J'écoute toujours. Ils sont à part. Ensuite, Eels, « Hombre Lobo : 12 Songs Of Desire » (2009), son meilleur album selon moi, avec « Souljacker » (2001). Sa musique m'est familière. Mélange de blues et pop anglaise, très mélodieux. Et enfin, Elvis Costello, « My Aim Is True » (1977). J'ai découvert ses albums récemment en fait. Avant, sa voix m'irritait, mais j'ai passé le cap, et sa voix qui m'était pénible a fini par me convaincre. Supers chansons, super look, super guitare.

    The Rodeo assurera des premières parties de Dionysos en 2016, et plusieurs dates de concerts vont bientôt tomber...

    Prochain concert d'Aries Sun le 11 février à la Mécanique Ondulatoire

    Discographie de The Rodeo: LP “La Musica Del Diavolo” (2015); EP “Tale Of Woe” (2014); EP “Cold Heart” (2012); Single “Cold Heart” (2012); LP “Music Maelström” (2011); EP “Hotel Utah” (2010); EP “My First EP” (2008)

    Twitter : https://twitter.com/therodeo (@therodeo)
    Facebook : https://www.facebook.com/therodeo/


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  • Interview du groupe I Can Fly, 2 octobre 2015.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Interview du groupe I Can Fly (2 octobre 2015)

    Dans le sillage de Joy Division et dans celui, plus proche, de Motorama, le courant post-punk est présent partout dans le monde, une kyrielle de groupes n'hésitant pas à mettre la basse en avant, et le duo guitare-synthé en lévitation, créant une solide esthétique romantico-vaporeuse. Après Agency, groupe turc que nous avons rencontré il y a quelques mois, direction le Mexique, avec le groupe I Can Fly.

    Pour en savoir plus sur I Can Fly :

       - Facebook : https://www.facebook.com/icnfly
       - Twitter : https://twitter.com/icanflyband (@ICanFlyBand)
       - Bandcamp : https://icnfly.bandcamp.com/

     

    Baptiste et Gérald : Pouvez-vous présenter votre groupe ? Comment vous-êtes vous rencontrés ?
    I Can Fly : Notre groupe s'appelle I Can Fly. Nous sommes un groupe indépendant originaire de l’État de México, à quelques kilomètres de la ville de México, la capitale. Il nous a fallu une année pour mettre en place le projet et sortir un EP (“I Can Fly EP”). Nous sommes cinq à composer le groupe : Oliver Ortega, voix et guitare ; Tomas Rojas, guitare ; Jair Rodríguez, batterie ; Gerardo Reyes, synthé ; et Mario Rodríguez, basse. Nous nous sommes tous connus grâce à la musique : avant I Can Fly, chacun jouait dans des projets musicaux différents qui nous ont conduits à jouer dans des fêtes avec des amis et dans quelques bars. C'est là que nous avons commencé à nous voir et à tisser des liens d'amitié.
    Oliver, Tomás et Jair ont joué dans un groupe avant I Can Fly, mais pour différentes raisons ce projet n'a pas fonctionné et ils ont commencé à jouer juste tous les trois. Mario, que nous avions croisé dans quelques soirées, est arrivé peu de temps après et s'est occupé des parties de basse. Gerardo, au synthé, est arrivé plus tard, c'est un ami qui nous l'a recommandé.
    En ce qui concerne le nom du groupe, I Can Fly, il part de ce rêve qu'a toujours eu l'être humain, celui de voler. Bien que les humains puissent voler grâce à des machines bien spécifiques ou grâce à des moyens de transport, nous ne pourrons jamais voler par nous-mêmes. C'est une faculté unique, qui n'appartient qu'à certains êtres vivants et que la nature ne nous a pas donnée. Cette idée produit une sensation très particulière chez les êtres humains et nous essayons de la transmettre à travers notre musique.

    B&G : Passons à vos influences musicales et aux groupes qui vous ont donné envie de faire de la musique.
    ICF : Nous avons tous des goûts assez différents, qui vont de la musique classique au hip-hop, mais ce qui fait le lien au sein du groupe c'est essentiellement le post-punk. C'est la raison pour laquelle la musique que nous faisons représente ce son bien particulier. Nous nous retrouvons par exemple dans plusieurs groupes et dans plusieurs disques qui ont marqué une grande partie de nos vies, dans tous les sens du terme, et qui nous ont amené à jouer de la musique. Nous pourrions citer “Antics” de Interpol, “Unknown Pleasures” de Joy Division, “Ok Computer” de Radiohead, “Diminuendo” de Lowlife, “Alps” de Motorama, “Humbug” de Arctic Monkeys, “She Wants Revenge” de She Wants Revenge, etc. En ce qui concerne les groupes actuels, Motorama fait clairement partie des groupes que chacun des membres du groupe adore. Mais nous en suivons bien d'autres, comme Lebanon Hanover, Human Tetris, She Past Away, Trust, Whitest Boy Alive, The Maccabees, etc.

    B&G : Comment se porte la scène indie pop au Mexique ?
    ICF : La musique indépendante a gagné beaucoup de terrain dans pas mal d'endroits au Mexique. Il y a de plus en plus de groupes, chacun proposant une intention différente. Le nombre de groupes indépendants qui existent rien que dans la ville de México est impressionnant, d'autant plus qu'ils sont très actifs, que ce soit dans le cadre de l'organisation de concerts ou sur les réseaux sociaux.
    En revanche, il nous semble plus difficile de parler d'une communauté pop indé dans tout le pays, même s'il existe plein de petites associations ou de collectifs qui se démènent pour organiser des événements auxquels le public se participe toujours...   Ces collectifs se distinguent via l'organisation d'événements dans des genres bien spécifiques. Nous faisons par exemple partie du collectif Escena Negra qui se bat pour monter des concerts de groupes de post-punk, new wave, synth wave, entre autres. Ce sont de vrais amis. Un autre exemple de ce type de collectifs avec lequel nous avons collaboré est LIVET, qui organise des concerts de post rock, math rock ou dream pop. Grâce à ce mouvement indie pop, nous avons rencontré beaucoup de groupes de qualité qui, parfois, sont devenus nos amis, comme Bellenger, Instinto de Ave, Hombre Bestia ou Saturday TV.

    B&G : Projetons-nous un peu dans l'avenir : comptez-vous sortir un nouvel EP ou un album en 2016 ? Des concerts prévus au Mexique, et peut-être en dehors ?
    ICF : Pour la fin de cette année 2015, nous allons continuer de jouer et de présenter notre premier EP. En ce qui concerne le début de l'année 2016, nous prévoyons de commencer à bosser sur nos prochaines compos, il s'agira d'un autre EP dont nous avons déjà trouvé le titre… Si tout se passe bien, nous pourrons enregistrer et sortir le disque dans la même année. Pour le moment, nous avons quelques dates prévues dans la ville de México et dans d'autres régions du pays. Grâce aux réseaux sociaux, notre musique a atteint plusieurs pays, comme la Russie, les États-Unis, la France, le Pérou et le Royaume-Uni, ce qui nous rend très heureux ! Nous avons reçu quelques invitations pour aller jouer aux États-Unis ou au Pérou ; pour l'instant malheureusement il n'y a rien eu de concret. Mais ce serait un honneur de pouvoir jouer notre musique ailleurs qu'au Mexique.

    Et pour ceux qui ne parlent pas français, voici l'interview en VO (donc en espagnol).

    Para aquellos que no hablan francès, aqui es la version original de la entrevista en español.

    Interview du groupe I Can Fly (2 octobre 2015)

    Baptiste et Gérald : ¿Podéis presentarse? ¿Cómo se conocieron los miembros de la banda I Can Fly?
    I Can Fly : Hola, somos I Can Fly, una banda independiente originaria del Estado de México, a unos cuantos kilómetros de la Ciudad de México, capital del país. Llevamos aproximadamente un año de haber formado este proyecto y contamos con un EP (I Can Fly EP).
    Los miembros de la banda son : Oliver Ortega, Voz y Guitarra ; Tomas Rojas, Guitarra ; Jair Rodríguez, Batería ; Gerardo Reyes, Sintetizador ; Mario Rodríguez, Bajo.
    Nos conocemos gracias a la música, antes de I Can Fly todos teníamos distintos proyectos musicales y con éstos tocábamos en fiestas de amigos y algunos bares, fue ahí donde empezamos a convivir y crear una amistad. Oliver, Tomás y Jair tocábamos en una misma banda, antes de I Can Fly, por diversas cuestiones, ese proyecto terminó y empezamos a hacer música sólo nosotros tres. Mario llegó poco tiempo después a tocar el bajo, a él ya lo conocíamos de algunas fiestas. Gerardo se integró a tocar el sintetizador más adelante, él llegó por recomendación de un amigo nuestro. Nuestro nombre, I Can Fly, nace a partir de un sueño que siempre ha tenido el ser humano: volar. Si bien los seres humanos podemos volar por medio de herramientas o vehículos de transporte, nunca hemos podido volar por cuenta propia. Es una capacidad única de algunos seres vivos y que la naturaleza no nos brindó a nosotros. Esta idea produce en la humanidad una sensación muy peculiar y que nosotros tratamos de transmitir por medio de nuestra música.

    B&G : ¿Cuáles son vuestras influencias y cuáles son los grupos y discos que han dado a ustedes el deseo de hacer música?
    ICF : Cada uno de nosotros tenemos gustos muy distintos, que pueden ir desde la música clásica hasta el hip-hop, pero esencialmente, lo que une a la banda, es el Post-punk y es por eso que la música que creamos tiene ese particular sonido.  Coincidimos en muchas bandas y particularmente en algunos discos que han marcado gran parte de nuestra vida en todos los sentidos, incluyendo la inquietud por tocar. Podríamos mencionar Antics de Interpol, Unknown Pleasures de Joy División, Ok Computer de Radiohead, Diminuendo de Lowlife, Alps de Motorama, Humbug de Arctic Monkeys, She Wants Revenge de She Wants Revenge, etc. Claro, Motorama es un gusto en común que tenemos los miembros I Can Fly. Además de ellos las bandas actuales que escuchamos  son muchas, por ejemplo: Lebanon Hanover, Human Tetris, She Past Away, Trust, Whitest Boy Alive, The Maccabees, etc.

    B&G : ¿Podéis decir algo sobre el paisaje de música independiente en México? ¿Se puede hablar de una comunidad independiente en México? ¿Tenéis algunos contactos entre grupos independientes mexicanos?
    ICF : La música independiente ha tomado gran fuerza en muchas zonas de México. Cada vez existen más bandas, cada una con una propuesta distinta. Es impresionante  la cantidad de bandas Independientes que existen tan solo en la Ciudad de México y que tienen actividad tanto en eventos en vivo como en producciones musicales y en redes sociales.
    Hablar de una comunidad independiente en todo el país, creo que es muy difícil, pero por supuesto existen muchas comunidades o colectivos pequeños que se encargan de organizar eventos y donde siempre asiste gente. Estos colectivos por lo regular, se caracterizan por organizar eventos de géneros específicos. Nosotros por ejemplo somos amigos y formamos parte del colectivo Escena Negra, el cual se encarga de realizar presentaciones de bandas de Post-punk, New wave, Synth wave, entre otros. Otro ejemplo es el colectivo LIVET, que realiza presentaciones de Post Rock, Math Rock o Dream Pop, con el cual también hemos colaborado. En este movimiento independiente hemos conocido bandas de mucha calidad y que también se han convertido en nuestros amigos, por ejemplo Bellenger, Instinto de Ave, Hombre Bestia o Saturday TV.

    B&G : ¿Después de su primer EP, cuáles son vuestros proyectos para 2015 y 2016? ¿Un nuevo EP? ¿Un LP? ¿Conciertos en México y fuera de México?
    ICF : Lo que resta del 2015 lo dedicaremos a tocar y presentar nuestro EP. Para inicios del 2016 planeamos empezar a componer nuestro siguiente material, se trata de otro EP del cual ya tenemos el nombre. Si todo sale bien, lo grabaremos y publicaremos ese mismo año.
    Por ahora tenemos algunas fechas agendadas en la Ciudad de México y un par de estados de la República. Por medio de las redes sociales nuestra música ha llegado a diferentes países, tales como; Rusia, EUA, Francia, Perú y  Reino Unido. Lo cual nos alegra mucho. Existen algunas invitaciones para ir a otros países como EUA y Perú, pero aún no se ha concretado nada, sería un honor poder presentar nuestra música fuera del país.


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  • Interview de Victor Peynichou, directeur artistique du label Midnight Special Records (cofondé avec Marius Duflot).
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN. 19 septembre 2015.

    Le mercredi 23 septembre, le label Midnight Special Records fêtera ses 4 ans au Glazart. A l’approche de cet anniversaire, nous avons rencontré Victor Peynichou, un des fondateurs de ce label. L’occasion de revenir sur l’histoire, l’esprit et les artistes de Midnight Special Records.

    Interview de Victor Peynichou (label Midnight Special Records)

    Baptiste et Gérald : Peux-tu nous parler du parcours qui t'a mené à être parallèlement un musicien très prolifique et à la création du label Midnight Special Records ?
    Victor Peynichou : Sans remonter trop loin, je peux dire qu'au moment de l'adolescence j'avais monté quelques projets musicaux. Je jouais dans quelques groupes, notamment avec Marius, avec lequel j'ai fondé le label par la suite. A l'âge de 16 ans, j'ai commencé à me produire, à faire des concerts. A force d'organiser les concerts de mes groupes, je me suis mis à en organiser pour d'autres… J'ai monté quelques mini-festivals, toujours à Paris, dans des cafés concerts, comme le Café Courant, dans le quartier d'Aligre. Il y avait beaucoup de musique là-bas à l'époque. Il y avait des jams de blues dans tous les sens, des petits concerts rock et expérimentaux. Au final, je m'occupais pas mal de l'aspect organisationnel, tandis que Marius de son côté était plus branché par l'enregistrement… Une complémentarité assez naturelle s'est donc créée entre nous. On a même habité ensemble, toujours dans ce quartier de la place d'Aligre. Et un jour je lui ai dit, sans trop y avoir réfléchi : « Tiens on pourrait sortir une cassette ; on ramène des artistes, et on les enregistre ». On a sorti une première cassette début 2011, la première du label Midnight Special …

    Interview de Victor Peynichou (label Midnight Special Records)

    B&G : Comment s'est déroulée la phase du création du label ?
    VP : Midnight Special est une chanson de LeadBelly… En 2009-2010, j'organisais régulièrement des soirées en utilisant ce nom, qu'on a repris le label. J'ai d'ailleurs fait une soirée avec Baptiste Hamon, qui s'appelait à l'époque Texas in Paris. J'avais organisé un mini festival où Cléa Vincent avait joué, avec My Broken Frame, Caandides et Catholic Spray. On réalise un premier enregistrement en 2010, avec Freckles en face A, une artiste française qui faisait du folk, et LluLLaiLLaco en face B, folk aussi mais avec des influences plus indé... On sort cette première production début 2011, au moment de la création du label. On a tout de suite trouvé cela excitant, même si nous n'avions aucune idée concrète sur ce qu'était le pilotage d'un label, on a tout fait à tâtons. On enregistrait à la maison… La seconde cassette c'était avec Cléa Vincent et Baptiste Hamon. Cléa, je l'avais vue dans un Open Mic au bar La Faille à Ménilmontant, et elle m'avait scotché. Je suis allé la voir et je lui ai dit : « C'est génial ce que tu fais ! ». Je l'ai rattachée direct à un festival que j'organisais, ça se passait dans la salle Les Combustibles (maintenant Le Pop Up...). Elle est venue ensuite me présenter ses projets, notamment un groupe de bossa qui s'appelait Les Coquillages, elle jouait des titres de Katerine et Gainsbourg, entre autres. D'un autre côté, Baptiste Hamon, qui rentrait du Pérou, me dit : « J'ai des chansons en français, j'aimerais bien essayer de les sortir ». Il me les a jouées, et ça m'a tout de suite branché. Pendant l'enregistrement, il y avait une ambiance de fou… En même temps, on avait un peu plus de moyens, le label prenait forme.

    B&G : Dans quel esprit avez-vous créé Midnight Special Records ?
    VP : On a fait le label pour avoir notre propre son. L'idée était de tout enregistrer, de A à Z. On passait une semaine dans un appart', malgré les voisins. On calait un groupe dans un appartement, une batterie dans une pièce, une guitare dans une autre, des amplis qui crachaient dans la salle de bain... Un jour, Emiko Ota enregistrait chez nous (pour le groupe Traditional Monsters, avec Dick Turner), moi j'arrivais de Ledru-Rollin par une rue proche de notre appart', et je me suis demandé ce qui se passait dans la rue, c'était le bordel total ! En fait c'était sa batterie qui résonnait dans tout le quartier. Il y a aussi la fois où, dans ce même appart', on enregistrait un titre de La Femme, une nouvelle version de La Femme Ressort, pour une compilation, ça a été très dur à mixer : il n'y a pas un moment où ils ne parlaient pas !

    B&G : Quelle est la particularité de Midnight ?
    VP : Pour savoir ce qu'on est, il faut tout écouter ! Avec Marius, on a essayé d'installer une touche sonore, plutôt que de faire du label une étiquette. On n'est pas un label pop, ni un label punk. On a toujours essayé d'insister sur le style et la signature Midnight, quel que soit le genre. C'est quelque chose qui se fait naturellement, très liée à l'ambiance : on enregistre avec des amis, ça change tout car on peut communiquer. Un enregistrement peut tout donner, et le fait d'enregistrer avec des gens qu'on comprend et avec lesquels on partage certaines références, cela permet d’obtenir une certaine osmose, d'avoir un résultat vraiment collectif. Il y a quelque chose d'assez familial. Cette touche sonore n'est pas préparée en fait. Une petite anecdote qui illustre cette générosité : sur les premières cassettes, on les faisait nous-mêmes, cela prenait 20 minutes par face, c'était du temps réel ! On y a passé trois jours rien que pour la première release ! On mettait des réveils... On savait que le fait d'avoir une deuxième platine cassette nous aurait aidés : j'ai demandé à Kim Giani, que je ne connaissais pas encore très bien, s'il avait un deck, il m'a dit : « Oui bien sûr. Viens le chercher chez moi ! »... Après cet épisode, il avait repris un titre des Bee Gees, Run to Me, sur une de nos compil', avec un gars des Natas Loves You. De la même manière, pour illustrer ce travail collectif qui correspond bien à Midnight, on avait créé le groupe Sex Tape pour une tournée américaine que Michelle Blades avait organisée. Le groupe était composée de Michelle Blades, Malvina Meinier, Marius avec son projet Ashtray, et moi avec Money Jungle. L'idée était de réinterpréter les morceaux de chacun, au lieu de faire quatre concerts à la suite… On a fait le même coup pour la tournée avec Cléa Vincent, Michelle Blades et Womanmay aux États-Unis cet été.

    B&G : Tu peux nous dire quelques mots sur tes influences musicales ?
    VP : J'ai commencé à apprendre la guitare à 15 ans, je jouais du blues. Je suis venu au rock après. Quand j'étais petit, j'écoutais les classiques : Bob Dylan, les Stones... Et puis j'ai flashé sur le Blues : Elmore James, Robert Johnson évidemment, et Buddy Guy pour son jeu de guitare. Je n'écoutais que ça. Marius quant à lui avait un groupe plus psyché, il écoutait pas mal de trucs des 90s, les Breeders, du grunge… Il a toujours été branché par la disto, et par tout ce qui est un peu radical dans les choix sonores et dans les paroles aussi.

    B&G : Faisons un petit tour des artistes Midnight… Commençons par Cléa Vincent, révélation pop de l'année 2014…
    VP : Une compositrice géniale, un jeu de piano unique ; j'adore quand elle improvise. Elle possède une réelle sensibilité : quand elle interprète ses morceaux, elle les vit vraiment. Elle commence aussi à chercher des choses un peu plus soul dans sa voix en ce moment… Elle aime beaucoup Carole King, en voilà peut-être la raison. C'est vrai que ses deux EPs ont très bien marché, notamment le second, « Non Mais Oui, Vol. 2 ». En même temps, je n'avais aucun doute sur le fait que ça marcherait ! Il suffisait de la montrer au plus grand nombre. Ce qui assoit sa réussite, c'est vraiment la qualité de sa compo, et non pas une tendance. Elle ne fonctionne pas sur une mode. Raphaël a été un apport très solide et très intéressant pour elle : sa musique a pris une nouvelle couleur.

    B&G : Malvina Meinier, quant à elle, vient de sortir « Home », un disque foisonnant, difficile à cerner malgré tout, peut-être un peu inaccessible...
    VP : On ne s'interroge pas sur ce type de problématique accessible/inaccessible. Malvina a composé cet album, « Home », à travers lequel elle a totalement construit un univers. Elle a une capacité hallucinante à créer des ambiances. Cela dit je comprends le questionnement, car la formule couplet-refrain a évidemment plus de chances de fonctionner. Mais chez Midnight nous n'avons jamais eu de hiérarchie des goûts. On a toujours considéré que n'importe quelle musique pouvait être écoutée par n'importe qui…

    B&G : Parle-nous de Kim, ce multi-instrumentiste inspiré et ultra productif ! Vous avez sorti « KIM Sings The Blues » chez Midnight il y a quelques mois...
    VP : Kim voulait sortir un disque de Blues. Marius et moi on est vraiment fans de sa musique, en plus d'être potes avec lui ; nous n'avons pas hésité une seconde ! Pour l'enregistrement, Kim a fait un choix particulier, il s'est posé en tant qu'interprète. On a fait tous les arrangements, on lui a proposé les morceaux, il est venu au studio et il a chanté. Pour rester dans cet esprit participatif cher à Midnight, on avait demandé à Michelle Blades et Malvina Meinier de composer un titre, non pas sur une structure blues, mais plutôt sur ce qu'elles pensaient être un blues. Michelle a composé What They Called A Descent, et Malvina Crystal In Veins. Cléa Vincent aussi a joué sur cet album, ainsi que Dick Turner (pour un titre qui ne figure pas sur l'album, mais qui est sorti en single), Junior Vic Band et Doc Lou Trio (deux groupes dans lesquels je joue et avec lesquels j'ai dû faire 15 fois le tour de la France), Sacha (le guitariste de la Femme), René Miller et Marius.

    B&G : Il y a Michelle Blades aussi, qui vient de sortir l'album « Ataraxia ».
    VP : Nous avons sorti ce disque en mai 2015. C'est une grande compositrice. Elle possède un débit de création assez hallucinant et une grosse capacité d'adaptation à tous les styles. Elle ne va jamais chercher les harmonies simplistes. Elle a aussi un jeu de guitare unique : elle joue beaucoup en arpèges, ou plutôt dans des formes d'arpèges particulières, très liées à sa pratique du ukulélé. C'est en partie cette façon d'appréhender la guitare qui confère à ses morceaux un style assez unique. C'est aussi Michelle qui nous a présenté une autre artiste Midnight, Womanmay. C'est une Vénézuélienne qui fait une musique hypnotique très intéressante.

    B&G : Midnight Special records fête ses quatre ans mercredi prochain au Glazart, quel est le programme ?
    VP : Malvina Meinier viendra jouer son dernier album, « Home ». Puis Michelle Blades. Sans oublier Gazza du collectif Jalousie, qui fera un DJ set.

    B&G : Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
    VP : Nous prévoyons de monter un nouveau studio d'enregistrement. Et évidemment nous souhaitons continuer à produire les artistes avec la liberté que nous avons actuellement. Continuer d'expérimenter au maximum, de découvrir de nouveaux artistes.

    Interview de Victor Peynichou (label Midnight Special Records)

    B&G : C'est le moment tant attendu de l'interview « dernier coup » ! Dernier coup de foudre ?
    VP : Aux États-Unis, j'ai découvert plusieurs groupes pendant la tournée. Anibal Velasquez par exemple ; c'est de la musique latine, avec de l'accordéon… Je suis tombé sur son vinyle, « Mambo Loco » (cf photo de droite ci-dessus), à Lyon. Je pourrais aussi citer Chastity Belt, avec leur nouveau disque « Time To Go Home », qu'on écoutait beaucoup sur la route pour nous motiver.

    B&G : Dernier coup dur ?
    VP : Le fait de rentrer des États-Unis et qu'il pleuve tous les jours à Paris…

    B&G : Dernier coup de barre ?
    VP : Après la tournée américaine ! On a fait 6 000 kilomètres, on est sortis lessivés…

    B&G : Dernier coup de rouge ?
    VP : Plutôt un non coup de rouge : je n'ai pas goûté de bourbon au Kentucky, c'est un vrai regret.


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