• Interview de Mi Nave, 12 janvier 2015.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Interview de Mi Nave, 12 janvier 2015

    Rostov-sur-le-Don en Russie. Marseille en France. Rosario en Argentine. Quel est le point commun entre ces villes ? L'indie pop et le post-punk ! Si vous aimez Aline et Motorama, dépêchez-vous d'écouter "Estela" du groupe Mi Nave, un des meilleurs albums de 2014. Partons maintenant à la découverte de Mi Nave, avec cette interview que nous avons traduite de l'espagnol en français.

    Baptiste & Gérald  : Pouvez-vous nous présenter le groupe Mi Nave ? Qui sont les membres du groupe ? Comment vous-êtes vous rencontrés ? Quelle est votre histoire ? Pourquoi le nom Mi Nave ?
    Mi Nave : Lorsque nous avons lancé le groupe Mi Nave, nous ne pensions pas du tout en arriver là où nous en sommes aujourd’hui, avec ces deux albums et cette résonance relative. Andrés et Feli sont frangins et ils ont commencé à jouer ensemble quand ils vivaient chez leurs parents ; ils composaient des chansons pour s’amuser, par plaisir – c’est d’ailleurs toujours le cas. En 2008, nous avons enregistré un EP en duo (« Mi Nave EP ») ; nous l’avons enregistré avec Paul Crisci, un ami qui a été en quelque sorte notre producteur et qui nous a aidé à poser les bases de nos morceaux, ainsi que dans la recherche de sonorités. En 2009, Andrés a rencontré Martin Salvador Greco, ils ont une passion commune pour la photographie, et il s’avère par ailleurs qu’ils ont sensiblement les mêmes goûts musicaux. Nous avons donc commencé à nous réunir à la maison ; Martin a commencé à enregistrer toutes les sessions de musique que nous faisions avec sa propre table de mixage (nous possédons toujours ces enregistrements). Après quelques tentatives pour recruter un batteur, nous avons eu l’opportunité de jouer enfin en live avec le groupe Atrás Hay Truenos (atrashaytruenos.bandcamp.com). Santo Martinez s’est alors collé à la batterie et Mauro Cuffaro au synthétiseur. Avec cette formation, nous avons enregistré, après une période d’essais, notre premier LP « Brillante », toujours avec l’appui de Martin, plus expérimenté, et qui disposait d’une table de mixage moins primitive.

    En 2012, après avoir sorti « Brillante », Ivan Brito nous a rejoint à la batterie, ainsi que Jo Maidagan, et avec cette nouvelle formation nous avons passé deux années à jouer très dur et à préparer les thèmes qui constitueraient l’ossature de notre deuxième disque « Estela » qui n’allait voir le jour qu’en 2014. Cet album a également été enregistré en studio par Martin Salvador Greco dans des conditions de plus en plus professionnelles.

    Enfin, concernant le nom de notre groupe, on pourrait dire qu’il faut prendre Mi Nave de façon assez littérale (My Spaceship). Nous sommes un équipage dans lequel chaque membre s’améliore avec le temps qui passe ; un équipage lancé à travers l'espace sans destination particulière ; un équipage au sein duquel les membres sont interchangeables, chacun apportant ses talents pour modifier l’itinéraire et les ambitions.

    B&G : Quelles sont vos influences ? Post-punk et new wave (l'introduction de basse sur Feriado Puente n’est pas sans rappeler le jeu de Peter Hook) ? Shoegaze ?
    MN : Nos influences sont très variées (dans les styles, les époques, les pays) et plusieurs de nos membres sont d’authentiques mélomanes. Nous partons d’exercices d’improvisation (« zapadas ») pour composer nos morceaux ; lorsque nous sommes en voyage, chacun laisse son propre univers infuser, il y a toujours des terrains communs, d’ailleurs nous avons, en termes d’influences, de nombreux groupes en commun. Cela nous arrive de nommer une session d’impro d’après le nom d’un groupe auquel elle nous fait penser. Ceci est une décision a posteriori, nous ne nous sommes jamais dit que nous allions composer une chanson dans le style Joy Division par exemple, bien qu’il s’agisse d’un groupe que nous apprécions évidemment, et bien que Peter Hook soit l'un des bassistes les plus influents du XXème siècle. Nous disons souvent que Mi Nave est un hommage à tout ce que nous aimons.

    La première fois que nous avons joué ensemble on nous a dit qu’on regardait tous par terre, dans le style shoegaze… Nous avons beaucoup de choses en commun.

    B&G : Votre album "Estela" est, à notre avis, l'un des meilleurs albums de l’année 2014. En particulier, les morceaux Remera de Dios et Andrés sont magiques. Que pensez-vous de la comparaison avec le groupe Motorama ou avec le groupe français Aline ? Quand on écoute les morceaux La rivière est profonde du groupe Aline et Remera de Dios, il y a un air de famille évident.
    Eh bien merci beaucoup pour ce compliment. Nous n’avions jamais écouté ces groupes avant mais je pense que nous avons beaucoup de choses en commun. Assurément nous avons les mêmes influences musicales. Et cela fait partie de ce qui peut se passer à tout moment dans l'histoire d’un groupe de musiciens, lorsqu’un style ou des familles surgissent, grâce à des similitudes que l’on sait saisir. Des musiciens qui, dans un sens, partagent un même code génétique et qui portent le même nom de famille. En Argentine il y a ce dicton : « On ne choisit pas sa famille, mais on choisit ses amis ». Et on se fait des amis car on a des choses en commun et car on partage une sensibilité commune.

    En revanche, on peut nous différencier en invoquant certaines influences liées à différentes musiques régionales du continent sud-américain comme la cumbia et la musique tropicale qui, depuis notre enfance, font partie de la bande originale des fêtes de famille et des fêtes d’école.

    B&G : Pouvez-vous nous parler du « paysage indie pop » en Argentine et en Amérique du Sud ?
    MN : L'Argentine se caractérise par une forte centralisation sur la ville de Buenos Aires ; il y a le sentiment, voire une tradition à certains égards, que tout passe par cette ville. Nous sommes de Rosario (à 300 km au nord de Buenos Aires), nous y vivons, nous y répétons, nous y travaillons, etc. Même s’il ne s’agit pas d’une petite ville (un million d’habitants), les auditeurs du type de musique que nous faisons figurent en petit nombre, cette situation est vécue par tous les groupes qui se situent en marge de la musique populaire, elle nous unit au-delà des questions de style. De plus il n'existe pas de sociétés ou d’entreprises qui nous représentent dans la mesure où nous sommes des indépendants. Pourtant, au cours des dernières années et à cause de cet état de fait, des labels indépendants ont commencé à émerger et à travailler avec ces groupes et la municipalité (EMR) s’est également mise à reconnaître l'existence de tous ces groupes. Nous avons pu sortir notre premier album grâce à un concours ; pour le deuxième album on a travaillé avec le label Polvo Bureau (polvobureau.bandcamp.com) qui regroupe beaucoup de bons groupes de la ville. Il y a également ces labels : soymutantenetlabel.bandcamp.com, discosdelsaladillo.bandcamp.com, repelentediscos.bandcamp.com, planetax.org.ar.

    Cette année, nous figurons aussi dans le catalogue du label hiddenoise.com, avec des relais à Quito en Equateur et à Barcelone en Espagne. Avec ce réseau, on pourrait affirmer que les distances sont de plus en plus courtes, grâce à internet, et cela tisse des liens plus forts entre les différentes villes sud-américaines qui se trouvent dans une situation similaire à la nôtre.

    B&G : En France, les groupes indie pop actuels assument de plus en plus la langue française. La musique reste clairement influencée par le monde anglo-saxon, mais avec des textes en français. Vous avez également choisi de chanter dans votre langue, l’espagnol. Pourquoi ?
    MN : Il appartient à chaque groupe de choisir la langue dans laquelle seront écrites leurs paroles ; nous pensons aussi que le chant en anglais est tentant car il ouvre les portes de différents pays et multiplie donc les chances d’y jouer et d’y travailler. En ce qui nous concerne, nous sommes un groupe quasi instrumental, la voix est un instrument, ce n’est pas la chose principale dans une chanson, ce n’en est qu’une partie. Nous pensons aussi que la mélodie est plus importante que les paroles ; la mélodie n'a pas de langue : si elle est jouée avec conviction, elle véhiculera ce que le chanteur veut dire.

    B&G : Votre album « Estela » a-t-il été distribué sur CD ou en vinyle hors d’Argentine ? Avez-vous des contacts en Europe et en France ?
    MN : Pour « Estela » nous avons fait une édition spéciale sur cassette qui est déjà épuisée. Le CD sera publié en 2015 par le label indépendant Polvo Boreau, et il sera aussi disponible sur le catalogue du label hiddenoise.com distribué à Quito et à Barcelone.

    B&G : Quels sont vos projets pour 2015 ? Un nouvel album ? Des concerts hors d'Argentine ? Peut-être en France ?!
    MN : Nous enregistrons un nouvel album qui sortira en 2015 ; nous espérons jouer beaucoup à travers notre pays, et oui, il y a une bonne chance que nous passions en Europe et en France.

    Facebook : https://www.facebook.com/minavee
    Bandcamp : http://minave.bandcamp.com/
    Twitter : @holaminave

    Et pour ceux qui ne parlent pas français, voici l'interview en VO (donc en espagnol).

    Para aquellos que no hablan francès, aqui es la version original de la entrevista en español.

    Baptiste & Gérald : ¿Podéis presentaros? ¿Quiénes son los miembros del grupo Mi Nave? ¿Cómo se conocieron? ¿Cuál es la historia de la banda? ¿Por qué el nombre Mi Nave?
    Mi Nave : Cuando comenzamos con Mi Nave nunca pensamos estar donde estamos ahora, con dos discos editados y esta cierta repercusión, Andrés y Feli son hermanos y juntos empezaron a tocar cuando vivían con sus padres, haciendo canciones como un juego que se compartía por pura diversión, aun lo sigue siendo. En el 2008 armamos un EP (Mi Nave EP) como duo, lo grabamos con Pablo Crisci un amigo que nos sirvió de productor y nos ayudo a armar las bases y buscar los sonidos. En el 2009 Andrés conoció a Martin Salvador Greco que juntos comparten una afinidad por la fotografía, y resultó que tenían muchos gustos musicales similares, así que empezamos a juntarnos en su casa, Martin empezó a grabar todas las sesiones musicales que hacíamos con una primitiva placa de audio que tenia (aun tenemos esas grabaciones). Después de un par de intentos de conseguir bateristas surgió la posibilidad de tocar en vivo con la banda Atrás hay truenos (atrashaytruenos.bandcamp.com) entonces Santo Martínez se sumo a la batería y trajo consigo a Mauro Cuffaro en sintetizadores , con esa formación grabamos luego de un tiempo de ensayos nuestro primer LP Brillante, grabado por un ya más experimentado Martin que contaba con una placa no tan primitiva.

    En el 2012 luego de editado Brillante Ivan Brito se sumó a la batería y trajo consigo a Jo Maidagan, con esta formación estuvimos durante dos años tocando intensamente y preparando los temas que conformarían el segundo disco Estela que se editaría recién en el 2014, este disco también fue grabado por Martin Salvador Greco en un estudio cada vez más profesional. Podríamos decir que el nombre Mi Nave es bastante literal (My Spaceship), somos una tripulación con unos equipos que se perfeccionan a medida que pasa el tiempo, lanzada al espacio sin un destino especifico, en la cual los integrantes se van intercambiando y cada uno aporta sus virtudes modificando su ruta y ambiciones.

    B&G : ¿Cuáles son vuestras influencias? Post-punk y new wave (la introducción de bajo sobre Feriado Puente recuerda el juego de Peter Hook)? ¿Shoegaze?
    MN : Nuestras influencias son muy variadas (estilos, épocas, países) y varios de nuestros integrantes son unos melómanos, nuestra manera de componer es a base de zapadas, entonces cuando estamos en ese viaje, cada uno deja que su propia influencia fluya, siempre hay lugares comunes, y así mismo tenemos muchas bandas en común, a veces nombramos a las zapadas según el nombre de la banda que nos evoca, pero es un hecho posterior, nunca decimos vamos a tocar un tema al estilo Joy división, es una banda que nos gusta a todos, y es uno de los bajistas más influyentes del siglo 20. Siempre decimos que Mi Nave es un tributo a todo lo que nos gusta.

    La primera vez que tocamos nos dijeron que todos mirábamos el piso, así que si eso es shoegaze tenemos mucho en común

    B&G : Su álbum “Estela” es, en nuestro opinión, uno de los mejores discos del año 2014. En particular Remera de Dios y Andrés. ¿Qué opináis de la comparación con el grupo Motorama o con el grupo francés Aline? Cuando se escucha las canciones La rivière est profonde del grupo Aline y Remera de Dios, realmente se siente que estan de la misma familia.
    Bueno muchas gracias por el reconocimiento, si bien nunca habíamos escuchado estas bandas antes si creo que tenemos mucho en común, seguro tenemos las mismas influencias musicales y es parte de lo que pasa en cualquier momento de la historia donde por similitud a veces se tiende a aglutinar conjuntos musicales y eso quizás genera un estilo o familias, estas comparten la misma genética y llevan el mismo apellido pero en nuestro país hay un dicho que dice “ la familia no se elige” pero los amigos si y uno se los hace por tener cosas en común y gustar de lo mismo.

    Creo que los que nos puede llegar a diferenciar a nosotros son algunas influencias de música regional de nuestro continente como la cumbia y la música tropical, que desde nuestra infancia es parte de la banda de sonido de fiestas familiares y escolares.

    B&G : ¿Podéis decir algo sobre el “indie pop paisaje” en Argentina? Y en América del Sur? ¿Se puede hablar de “comunidad indie pop” en Argentina y América del Sur? ¿Tenéis algunos contactos entre bandas indie pop argentinas y sudamericanas?
    MN : Argentina se caracteriza por una fuerte centralización en Buenos Aires, existe la sensación, o también la tradición nos hizo creer, de que todo pasa por esa ciudad. Nosotros somos de Rosario (300kms al norte de Buenos Aires) ciudad donde vivimos, ensayamos, trabajamos, etc.  Si bien no es una ciudad chica, tiene 1 millon de habitantes, si es chico el número de consumidores del tipo de música que nosotros hacemos,  esta condición agrupa a todas las bandas que quedan fuera de la música popular, eso nos une, más allá del estilo, además no hay empresas o companías que nos representen así que todas somos independientes. Aun así en los últimos años debido a esto empezaron a surgir Sellos independientes que empezaron a trabajar con estas bandas y la municipalidad (EMR) comenzó también a reconocer la existencia de todas estas bandas y a través de un concurso pudimos editar nuestro primer disco, para el segundo disco comenzamos a trabajar con el sello Polvo Bureau (polvobureau.bandcamp.com) que nuclea muchas de las buenas bandas de la ciudad, como este sello también existen: soymutantenetlabel.bandcamp.com, discosdelsaladillo.bandcamp.com, repelentediscos.bandcamp.com, planetax.org.ar.

    Este año también somos parte del catalogo del sello hiddenoise.com con base en Quito Ecuador y Barcelona España, con esta unión podríamos decir que internet hace cada vez más cortas las distancias y une con más fuerza a las distintas ciudades de Latinoamérica que pasan por lo mismo que nuestra ciudad.

    B&G : En Francia, los corrientes grupos de indie pop asumen nuestro idioma: hacen música influenciada claramente por el mundo anglosajón, pero con textos en francés (por ejemplo Aline, Mustang, Lescop, La Femme, Marc Desse, The Pirouettes, Cléa Vincent, Superets, La Féline, ...). También habéis elegido cantar en su idioma materno, es decir en español? Por qué? ¿Es una tendencia general para los grupos sudamericanos?
    MN : No sabemos que lleva a cada banda a elegir el idioma para hacer sus letras, creemos que cantar en inglés es muy tentador por que abre las puertas a distintos países y así las posibilidades de tocar y trabajar en ellos. En nuestro caso casi somos una banda instrumental, la voz es un instrumento, no es lo principal en una canción, es una parte más, además creemos que la melodía es más importante que la letra, la melodía no tiene idioma si está interpretado con convicción va a transmitir lo que el cantante quiera decir.

    B&G : Su álbum “Estela” se distribuyó en CD o vinilo fuera de Argentina? ¿Tenéis contactos en Europa y Francia?
    MN : Para Estela hicimos una edición especial en Cassettes que ya se agotó, el CD estará editado para este 2015 por el sello independiente Polvo Boreau, y estará dentro del catalogo también del sello hiddenoise.com que se distribuye por Quito y Barcelona.

    B&G : ¿Cuáles son vuestros proyectos para 2015? Un nuevo álbum? Conciertos fuera de Argentina? Tal vez en Francia?!
    MN : Estamos grabando un nuevo disco y estará para el 2015, esperamos tocar mucho por nuestro país, y si existe la posibilidad visitar Europa y Francia.


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  • Interview de Cléa vincent. Jeudi 20 novembre, Pop In.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Interview de Cléa Vincent, 20 novembre 2014

    Un an et demi plus tard, Little John’s Pop Life retrouve Cléa Vincent pour une longue interview, dans le cadre de la sortie de l’EP « Non Mais Oui 2/2 ». Une interview dans les mêmes conditions qu’en avril 2014 : toujours au Pop In, toujours à l’ouverture du bar ; et pourtant Cléa a fait du chemin, et elle n’est pas prête de faire une pause.

    Baptiste & Gérald : On s’est vu en avril 2014, pour la sortie de l’EP « Non Mais Oui 1/2 » ; à l’époque tu étais contente car on parlait « un peu de toi ». Depuis quelques semaines, ton nom se retrouve davantage dans les médias, et notamment dans les médias à la mode. J’imagine que tu es ravie ! Comment tu expliques ce succès ?
    Cléa Vincent : J’ai l’impression que c’est un cumul de petits événements. Il y a eu effectivement ce premier EP sorti en février avec Retiens Mon Désir qui a fait le « buzz », même si je n’aime pas le mot ! C’était une sorte de premier volet, une première clé d’entrée. Et puis il y a eu le spectacle Garçons; la presse a été plutôt bien informée de cet événement, parce que ça se passait pendant tout le mois juillet, parce que c’était aux Trois Baudets. Et enfin il y a eu Château Perdu, qui est sorti six mois plus tard, en octobre avec un clip assez réussi. C’est Michelle Blades qui a fait le clip. Elle fait partie du label Midnight Special Records, elle est la conseillère visuelle du label et par ailleurs une musicienne/chanteuse hors pair, une réalisatrice de clip fantastique, un vrai petit géni. Je reviens à Château Perdu : ce morceau est une clé d’entrée encore plus pop et plus directe que Retiens Mon Désir, c’était je pense un bon choix de deuxième morceau pour en remettre une couche, une façon d’insister pour qu’on écoute ma musique.

    Finalement, le petit succès actuel s’inscrit dans une succession de vagues, qui montrent aux gens qu’on bosse beaucoup, qu’on ne se précipite pas, et qu’on a vraiment envie de faire ça de nos vies, sans jamais rien lâcher. Côté radio, Château Perdu ne passe pas plus ni moins que Retiens Mon Désir ; on passe beaucoup sur les radios locales, les radios étudiantes et sur FIP. L’accès aux grandes radios est beaucoup plus difficile pour les indés. En revanche Château perdu est en rotation sur M6 et W9.
    On est tous très heureux de bosser ensemble, à notre rythme, à notre manière. Et avoir tant de résultats avec si peu de moyens, c’est miraculeux. Ce n’est pas l’argent qui compte : les journalistes s’intéressent à tout, aux grands comme aux petits projets. Il y a un vrai intérêt pour l’art. On pourrait penser que les journalistes sont payés pour écrire des articles, ben en fait non  (rires) !!

    B & G : Le deuxième EP, "Non Mais Oui 2/2", est-il meilleur que le premier ?
    CV : On a progressé en prod’, mais ce n’est pas moi qui ai progressé (rires), j’ai laissé plus de place au réal’, Raphaël Léger, qui est aussi le batteur du groupe. Sur le premier EP, il avait réalisé disons 30%, et là sur le deuxième je l’ai laissé réaliser 100%, quasiment. Il est super bon, je lui ai vraiment laissé beaucoup de place et j’ai bien fait.

    B & G : Quels sont les différences et les points communs de ces deux EP ?
    CV : J’ai l’impression qu’on sent que c’est la même personne qui a écrit le premier et le deuxième EP, heureusement ! Ce sont des chansons inspirées d’émotions particulières, des histoires d’amour, toujours. Les deux EP se font écho, il y a ce thème général qui n’a pas changé. La différence fondamentale se situe plus au niveau des sensations : le premier EP est plus chaleureux, un peu plus estival, alors que le deuxième est un peu plus hivernal. D’ailleurs l’un est sorti est au printemps, et l’autre en hiver.

    B & G : Comment se sont enchaînées composition et sélection des morceaux ?
    CV : Château Perdu a été composé juste après la sortie du premier EP. On a fait écouter une dizaine de morceaux à Victor Peynichou du label Midnight Special Records. Dans ces dix morceaux il y en avait des nouveaux et des anciens. On a finalement fait un mix. Ce Soir J’y Ai Pensé, je l’ai composé il y a longtemps, il y a au moins trois ou quatre ans. Dérives Du Lendemain, idem, c’est une ancienne chanson.

    B & G : Les concerts sont beaucoup plus denses également, maintenant que tu es accompagnée de trois musiciens. C’était voulu ? C’est ton groupe ?
    CV : J’avais toujours refusé d’avoir un bassiste, en me disant que la basse ça faisait chier (rires), mais j’ai fini par lâcher prise, en fait le groove d’une basse est difficile à remplacer. La dernière personne arrivée dans le groupe est donc le bassiste, qui est aussi mon coloc’, et également mon cousin germain ! Je l’adore, il joue hyper bien. Depuis qu’il est dans le groupe, il y a une nouvelle dimension. Ca joue mieux. On se lâche d’avantage…
    Il y a aussi Raphaël Thyss – qu’on appelle Rafyton, afin de le distinguer de Raphaël Léger – qui est au clavier et à la trompette, et qui était le seul vrai garçon sur scène lors du spectacle "Garçons" (cf. interview et live report).
    Et enfin la rencontre avec Raphaël Léger, le batteur de Tahiti 80. Lui, c’est la touche miraculeuse, si je ne l’avais pas rencontré, je n’en serais pas là aujourd’hui. Il a apporté un groove, mais aussi un minimalisme dans la batterie électronique que j’attendais depuis toujours. Il est vraiment très présent dans la réalisation de ma musique. Il fait partie du processus créatif et du coup je pense que cela se ressent sur scène parce qu’il est chez lui, c’est aussi son bébé (je déteste aussi cette expression, mais tant pis ! (rires).

    Au Point éphémère, un saxophoniste et deux choristes nous accompagnaient, mais bon on n’a pas pu les emmener en tournée, sinon il aurait fallu un bus pour transporter tout ce monde ! D’ailleurs, un petit mot pour une des deux choristes, Malvina Meinier qui joue dans le clip de Retiens Mon Désir et qui est surtout auteur-compositeur-interprète. C’est un monument ! Quand son clip va sortir, ça va mettre une claque à tout le monde. C’est une Martienne. Elle écrit pour des orchestres symphoniques. C’est un génie cette fille.

    B & G : Comment se passe la tournée ?
    CV : C’est donc ma deuxième tournée, qui est en deux parties. Elle redémarre le 18 décembre. La première s’est très bien passée. J’ai quasiment tout booké toute seule, donc j’apprends sur le tas cette tâche-là. Je suis retournée dans des salles géniales : le Chaff à Bruxelles par exemple. Et puis je cherche des nouveaux endroits à travers la France. C’est super de voir qu’on a davantage de retours, qu’on a des meilleurs cachets, qu’il y a de plus en plus de monde. C’est comme un puzzle qui prend forme petit à petit. Il y a une histoire aussi qui se crée avec le groupe. On a progressé dans notre façon d’arriver dans les salles, de se préparer… Donc ça fait plaisir de voir que ces tournées de type Do It Yourself fonctionnent !
    Et on est allé en Islande aussi, on a joué deux jours de suite. C’était dans le cadre du Iceland Airwaves Music Festival. Il y avait beaucoup de groupes islandais et quelques groupes internationaux. C’est un festival plutôt orienté pop-rock indé et électro indé. On y est allés pour voir des concerts, et on a réussi à trouver deux dates en off. La Femme aussi était là, sur la grande scène du festival. Ils sont adorables, mais aussi super talentueux et très créatifs. Ils s’autorisent à peu près tout. Par exemple dans la façon de s’habiller : un des gars de La Femme, Sam, avait acheté une grosse peau de bête en Islande, et il avait mis en dessous une espèce de pyjama rouge en une pièce, genre cow-boy. Sur scène il avait trop la classe, c’était trop marrant !

    B & G : Ça fonctionne la French Pop à l’étranger ?
    CV : Les Islandais ont beaucoup aimé notre concert. Et le concert de La Femme c’était la folie ! Le public les attendait avec impatience, ils connaissaient les morceaux. Ils ont fait un chahut d’enfer.

    B & G : Qu’est-ce-qui a changé dans ta façon de faire des concerts ?
    CV : J’ai trouvé l’équipe, le groupe, alors on arrive plus confiants. Je doute moins de moi-même depuis que je joue avec trois mecs, car je sais que ça leur fait plaisir d’être avec moi en tournée. J’essaie de ne plus me prendre la tête, et de profiter de chaque concert. J’essaie aussi d’être moins timide.

    B & G : Cléa Vincent c’est devenu un groupe en fait ?
    CV :  je considère que je fais partie d’une famille de gens. A l’intérieur, il y a mes musiciens, mais d’autres musiciens comme Kim Giani, Noé Beaucardet, Olivier Ikéda, Alexandre Bourit par exemple. A tout moment, je peux les appeler pour leur proposer des projets, et vice-versa. Par exemple, quand j’ai su qu’il y avait une place de multi-instrumentiste dans "Garçons", j’ai tout de suite pensé à Raphaël Thyss et j’ai proposé son nom. J’aime bien cette idée de collectif, où l’on sait qui sait faire quoi.

    Interview de Cléa Vincent, 20 novembre 2014

    B & G : Et parlons un peu de Baptiste W. Hamon. Pourquoi l’avoir invité lui sur ton deuxième EP, et pourquoi le choix de cette chanson de Daniel Darc ?
    CV : On a choisi de faire cette chanson, Seul Sous La Lune, la veille pour le lendemain. Il nous fallait une reprise, j’avais envie d’une reprise, mais on ne savait pas trop quoi faire, surtout après avoir repris All That She Wants de Ace of Base, qui est un morceau archi connu. Et puis j’ai pensé à ce morceau de Daniel Darc, mais je ne me sentais pas de parler le texte, ça ne m’allait pas vraiment. Raphael Léger a pensé à Baptiste W Hamon, et cela nous a semblé évident. Je le connais assez bien car il y a cinq ans on avait fait une cassette audio, la face A c’était lui, la face B c’était moi. On a commencé exactement en même temps à faire de la chanson en français.

    B & G : Et peux-tu nous révéler un secret : d’où vient cette casquette Chablis que porte Baptiste W. Hamon ?!
    CV : Je ne sais pas d’où vient la casquette originale, car celle qu’il porte est une copie. Quelqu’un avait cassé l’originale et l’a refaite faire ! Pour plus de détails, il faudra lui poser directement la question !

    B & G : La suite : tu avais déclaré à la sortie du premier EP « j’aimerais bien autoproduire mon album ». C’est toujours d’actualité ?
    CV : Avec Midnight, on va monter une structure. L’idée est de s’associer pour mes prochains enregistrements. Rester libres et propriétaires des bandes. Au printemps, on sortira un single, ça c’est sûr. Je suis très à l’aise avec le format court de l’EP : un single avec un clip, et quelques morceaux qui gravitent autour. Je trouve cela pas mal qu’après avoir sorti plein de formats courts, tu puisses sortir un format long, avec un choix de morceaux qui sont déjà parus. C’est un peu l’idée originale du 33 tours : une compilation des meilleurs chansons du 45 tours. Un album c’est beaucoup d’investissement, beaucoup de pression, il y a beaucoup d’enjeux financiers et cela peut tomber à l’eau. En gros, l’album c’est le bac, et les EP c’est le contrôle continu ! Donc plus ça avance, plus je compte sortir un nouvel EP, pas d’album pour le moment.

    B & G : Qu’est-ce-que tu écoutes en ce moment ?
    CV : Je suis très contente car en France il y a beaucoup de choses excellentes qui sortent. En ce moment, j’écoute Forever Pavot, je trouve leur album top. Il y aussi Julien Gasc, que j’aime beaucoup, et Aquaserge. C’est très libre comme musique. Ça me donne envie de sortir des formats habituels.

    B & G : Ton prochain concert ?
    CV : Je serai en première partie de Mustang lundi 24 novembre au Point éphémère, et je suis très heureuse ! J’aime tout chez Mustang : les thèmes abordés, le rythme ; les mélodies sont géniales, les textes sont fabuleux. Ils ont quand même réussi à sortir trois albums, les trois sont bons, tous les morceaux sont bons. Je trouve ça hallucinant. Les trois musiciens sont très charismatiques. Et pour info, j’ai commencé une petite collaboration avec Johan Gentile (le bassiste de mustang), on commence à écrire des chansons ensemble.


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  • Interview d'Alexandre Gimenez-Fauvety, 20 octobre 2014, Le Lock Groove (15 Rue Roger, 75014 Paris).
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    La commauté Pop Indé : interview d'Alexandre Gimenez-Fauvety

    Nous continuons notre dossier sur la communauté pop indé française avec une interview passionnée et passionnante d'Alexandre Gimenez-Fauvety, qui, avec son frère Etienne, a fondé le blog « Requiem Pour Un Twister » puis deux labels dédiés à l'édition de vinyles de musique indie pop, garage, psychédélique, power pop et shoegaze (« Croque Macadam » et « Requiem Pour un Twister »).

    Baptiste & Gérald : Peux-tu nous présenter vos différents projets ? D'abord le blog « Requiem Pour un Twister » ? Et les labels Requiem et Croque Macadam ?
    Alexandre Gimenez-Fauvety : Etienne et moi avons fondé le blog « Requiem Pour un Twister » en 2007. Au départ, notre blog était très orienté oldies, 60's. Puis on s'est remis à écouter des nouveautés, et donc à en parler dans le blog : Ty Segall, les Black Lips, Jay Reatard, ... Avant, on écoutait déjà de l'indie mais ces artistes nous parlaient beaucoup plus, car mon frère et moi avons un gros background 60's. Ça nous rappelait nos références mais sans être des copies conformes un peu chiantes.

    B&G : Quelles sont vos références ?
    AGF : Pour moi, les Byrds sont le plus grand groupe de tous les temps. Leur son jangly me rend fou. Et aussi les Beatles, Big Star, les Buzzcocks, les Beach Boys. Je suis un grand fan des groupes en B, c'est une obsession. J'aime beaucoup les Undertones, malheureusement c'est un groupe en U ! Les Zombies, les Mighty Lemon Drops, les Shop Assistants, Orange Juice, Monochrome Set, Hit Parade, New Order, les Cleaners From Venus, le premier Primal Scream.

    B&G : Des références françaises ?
    AGF : Je suis très fan des Calamités. Leur single Vélomoteur est un très bon morceau. Il y a aussi Marie Et Les Garçons, Gamine, les Freluquets, les Stagiaires, un groupe de Bordeaux qui faisait des choses très drôles.

    B&G : Ton frère et toi êtes tombés dans la marmite en même temps ?
    AGF : Etienne et moi avons deux ans de différence. Je suis le plus vieux, même si ça ne se voit pas (rires). Eh oui, j'ai trente et un ans ! On a commencé à écouter de la musique en même temps. D’abord du rock, comme tout le monde, quand nous étions petits, à l'âge de neuf ou dix ans : les Beatles, et d'autres choses moins avouables comme Queen ou Police. Au lycée, j'ai écouté beaucoup de musique électronique. Puis vers l'âge de 25 ans, je suis revenu au rock, via l'indie pop britannique, avec des groupes tels que Franz Ferdinand ou Bloc Party. Et surtout les scènes underground américaines : garage, psyché, post-punk. Ca correspondait plus à ce que j'étais que l'indie britannique. Pour moi, Jay Reatard a été une révélation. J'adore la démarche de ces groupes américains : ils font les trucs et s'en battent les couilles. Ils enchaînent les singles et font un album par an, sans se poser de question, sans perdre leur identité. C'est ce que je reproche parfois à des groupes français : ils réfléchissent trop et ils veulent trop en faire quand ils passent du single à l'album. Ceux qui ont réussi ce passage, en gardant leur identité, ce sont les Aline. Ils ont réussi à garder leur naïveté et leur romantisme, et même à les amplifier sur l'album « Regarde le Ciel ». Je Bois Et Puis Je Danse est un hymne générationnel pour la communauté indie pop en France et a aussi un potentiel évident pour toucher le grand public. Ils  ont réussi l'alliance parfaite entre indie pop, guitares jangly et rythmiques dansantes à la New Order. Ça m'a beaucoup touché. Mustang aussi, ils ont préservé leur identité, ils sont cohérents.

    B&G : Quelle était votre motivation à la création du blog « Requiem Pour un Twister » ?
    AGF : Avant tout parler de ce qui nous amusait, partager nos découvertes, nos émotions et les musiques qui nous font ressentir des choses fortes. On est poussé par une puissance qui est la musique, on a envie de s'impliquer, on a envie que les gens connaissent les groupes qu'on écoute plutôt que des trucs affreux que je vais éviter de citer. Je pense que c'est vraiment pour cela qu'on démarre un blog musical.

    B&G : D'ailleurs, la communauté pop française est très vivante, en particulier avec de nombreux blogs qui défendent vraiment une certaine idée de la musique et toute la scène française actuelle.
    AGF : Oui, ça a démarré vers 2009 / 2010, avec les Young Michelin - Aline, Mustang, Pendentif, Marc Desse, Lescop, La Femme, Moodoïd, Superets, …

    B&G : Après le blog, ton frère et toi avez décidé de monter des labels, « Croque Macadam » et « Requiem Pour un Twister ». Pourquoi et comment ?
    AGF : En fait, après le blog, l'étape suivante, c'était soit d'organiser des concerts, soit de faire des disques. Et comme on est des gros nerds des disques vinyles, on a voulu monter des labels. C'est moi qui me suis lancé le premier en 2011. C'est venu d'un pari avec des potes, les Guillotines. Je leur avais dit que s'ils enregistraient des morceaux et que je les trouvais cools, je m'engageais à les sortir. Ils ont enregistré quatre morceaux, dont deux qui m'ont plu tout de suite. Banco ! J'ai sorti le premier single en septembre 2011. Je l'ai fait tout seul, sans Etienne. C'est pour cela que je n'ai pas repris le nom « Requiem Pour un Twister » et que j'ai nommé le label « Croque Macadam ».

    B&G : Pourquoi le choix de ce nom ?
    AGF : Je suis un grand fan d'un label qui s'appelle « Burger Records ». Donc je me suis demandé quel était l'équivalent français du hamburger. C'est le croque-monsieur ! Il y avait aussi une chanson sur le bitume. Et ça a donné « Croque Macadam ». Je me suis dit que c'était assez con pour qu'on retienne ce nom facilement. Et, étonnamment, les gens ne le retiennent pas, ils disent « Croque Madame » une fois sur deux. Au moins, le nom n'est pas passe-partout, et j'ai une histoire que je peux raconter.

    B&G : Et l'autre label, « Requiem Pour un Twister » ?
    AGF : C'est le label que mon frère a monté. Quand j'ai sorti les singles des Young Sinclairs, on l'a fait ensemble. Ca a permis à Etienne, qui souhaitait aussi monter un label, de faire ses premières armes et de voir comment faire. Comme le nom « Requiem Pour un Twister » avait une petite renommée grâce au blog, il s'est dit que c'était dommage de ne pas en profiter. Le fait d'avoir deux labels avec deux noms différents crée un peu de confusion. Du coup, en mars de cette année, on a monté une structure juridique commune. L'idée, c'est que les singles sortiront sous le nom « Croque Macadam » et les albums sortiront sous le nom « Requiem Pour un Twister ».

    B&G : Comment vous y prenez-vous pour faire de la promo quand vous sortez des disques ?
    AGF : Je n'aime pas faire des choses sales, comme du mailing intempestif et massif. Je préfère contacter des gens qui ont un peu mon point de vue, qui vont me comprendre, qui ont le même langage que moi. D'ailleurs, je ne parlerai pas forcément aux gens que je contacte de tous les disques que je sors, je vais cibler sur des choses qui sont susceptibles de les toucher. Typiquement, quand je vous avais contactés sur votre blog, je vous avais parlé de Triptides et de Marble Arch car je pensais que ça vous correspondait.

    B&G : Tu as bien ciblé. Parmi les groupes de vos labels, on aimait déjà beaucoup les Young Sinclairs et Venera 4, et, grâce à ton message, on a découvert Triptides et Marble Arch, qui font vraiment de très belles choses.
    AGF : On sort le premier album de Venera 4 en janvier 2015. Pour cette sortie, on va faire une promo plus professionnelle. En fait, on sort des disques qui ressemblent à la musique qu'on aime : indie pop, shoegaze brumeux, guitares jangly façon Byrds, garage, power pop 70's un peu musclée, psyché.

    B&G : Comment découvrez les groupes ? Est-ce que vous les contactez ou est-ce que ce sont les groupes qui vous contactent ?
    AGF : Ca dépend. Par exemple, les Departure Kids m'ont contacté sur le blog pour que je chronique leur premier single. J'avais beaucoup aimé, je suivais ce qu'ils faisaient, et un copain du label Howlin' Banana m'a proposé qu'on sorte ensemble leur premier album. Ça me fait vraiment plaisir de défendre leur musique. Pour Marble Arch, c'est différent. Dès qu'ils ont posté leur musique, on a tout de suite aimé et on a été très rapides pour sortir leur disque en commun avec un autre label qui s'appelle Le Turc Mécanique. Pour Halasan Bazar, c'est un copain qui nous a fait connaître leur premier album qui n'était sorti qu'en cassette. On les a vus en concert et on les a trouvés géniaux. Du coup, on leur a proposé de rééditer leur album en vinyle, en partenariat avec le label américain qui avait sorti leur cassette. Franchement, leur album est superbe, très psyché, qui fait penser à Love, avec aussi des côtés Syd Barrett.

    B&G : Vous organisez aussi les soirées « Psychotic Reaction » ? Tu peux nous dire un mot sur ces soirées ?
    AGF : Oui, depuis maintenant un an, avec Howlin' Banana, Bong, Walking With The Beast et Yummy de Radio Campus Paris, on organise des soirées à l'International, avec des concerts de groupes garage, punk, shoegaze, psyché ou indie pop, venant de Paris et de province. L'idée était de créer une sorte de hub, de rendez-vous régulier. On essaye toujours de faire une soirée avec une tête d'affiche porteuse et des groupes plus confidentiels. L'idée est de profiter de la notoriété d'un groupe pour mettre le pied à l'étrier à des groupes moins connus. On a fait jouer d'excellents groupes : Forever Pavot, Pain Dimension, Travel Check, Sudden Death Of Stars, Venera 4, Lucid Dreams, Beat Mark, … Ce qui est très bien avec l'International, c'est qu'il y a un cachet fixe qui permet de faire venir des groupes de Province. Je pense qu'ils y sont gagnants car certaines soirées ont vraiment été blindées.

    B&G : Revenons aux groupes que vous avez sortis sur vos labels. The Young Sinclairs par exemple. C'est le plus gros groupe que vous avez signé, le plus « établi ». Comment cela s'est-il passé ?
    AGF : Etienne et moi étions des grands fans des Young Sinclairs. On se demandait pourquoi ce groupe n'était pas plus reconnu. On voulait acheter leurs disques et on leur a envoyé un mail pour savoir si le groupe existait encore. Comme ils nous ont répondu que oui, même s'ils n'avaient rien sorti depuis deux ans, on a tenté un super banco en leur posant la question « Ça vous dirait de sortir un 45 tours avec nous ? ». Ils étaient d'accord et nous ont donné une liste de titres qui n'étaient jamais sorti en physique. Et comme il y avait trop de morceaux bien, on a sorti deux 45 tours. Un premier, « Hurt My Pride », tiré à 300 exemplaires, dans un style garage, avec aussi un morceau folk rock. Un second plus indie pop, « New Day », tiré à 200 exemplaires. Ils vont sortir un album sur un label anglais, le label du gars de Cornershop. On a l'impression qu'on a relancé l'intérêt pour les Young Sinclairs, et on est très contents et très fiers de cela.

    B&G : Dans les groupes qui sont sortis sur vos labels, nous aimons aussi beaucoup Triptides. Bravo pour les pochettes de leurs trois 45 tours, qui rappellent les pochettes de Sarah Records et des Smiths.
    AGF : Tout à fait, comme c'est notre groupe le plus indie pop, on voulait vraiment faire un clin d’œil  à Sarah Records et aux Smiths. Les Triptides préparent actuellement un album, qui sortira sur Requiem. On a d'ailleurs un vrai échange avec eux pendant l'enregistrement. Ils nous envoient les morceaux et nous demandent notre avis. On les pousse à mettre un maximum de guitare 12 cordes bien jangly.

    B&G : Quels sont vos objectifs à court ou à moyen termes ?
    AGF : Le premier objectif, c'est d'être à l'équilibre financièrement et de ne pas perdre d'argent : par exemple faire des pressages à 500 copies et tout vendre. L'autre objectif, c'est d'arriver à donner plus de visibilité à nos disques, à trouver le temps de faire plus de promotion. Pour nous, le rêve serait de réussir à accompagner nos groupes plus longtemps. Par exemple, permettre aux prochains  Superets ou Forever Pavot de grandir avec nous : sortir un EP, un deuxième EP, puis un album, trouver un tourneur qui donne accès à des salles plus importantes, être programmé sur des radios nationales … Actuellement, un label comme Entreprise, qui a un catalogue très cohérent et qui fait un très beau travail de fond, a permis aux Superets d'avoir le développement qu'on ne pouvait pas leur offrir après leur premier 45 tours avec nous. Idem pour Forever Pavot qui a sorti son album chez  Born Bad Records, un label qui a une éthique et qu'on respecte beaucoup.

    B&G : On va terminer l'interview avec un questionnaire « Dernier Coup ». Dernier coup de cœur ?
    AGF : Ma dernière grande découverte musicale, c'est l'album « Phaedra » de Tangerine Dream, un groupe allemand des années 70.

    B&G : Dernier coup de gueule ?
    AGF : Un coup de gueule général contre la récupération du vinyle par les grosses maisons de disques et par des gens qui n'en comprennent pas les tenants ni les aboutissants, qui n'ont pas de passion pour l'objet vinyle et qui y voient juste une opportunité commerciale. Pour les petits labels comme nous, ça fait augmenter les prix, les tailles et les délais de pressage. Aujourd'hui, il y a de moins en moins de presseurs qui acceptent des séries de 300 copies. La plupart exigent un volume minimal de 500 copies et, pour nous, 500 copies, ça devient assez risqué financièrement. Je trouve aussi que les prix des vinyles chez les disquaires, qui ne font que subir et répercuter les prix auxquels ils achètent, sont parfois trop chers. Un prix correct pour un LP, c'est 15 à 16 Euros. Au delà de 20 Euros, ç'est vraiment cher. Et je ne parle même pas des rééditions à 25 ou 30 Euros, avec des masterings débiles faits en digital.

    B&G : Dernier coup dur ?
    AGF : Entre mai et septembre 2013, je n'ai rien sorti. J'ai même failli arrêter le label car je n'avais plus de trop de projets. J'étais aussi assez triste de perdre Superets. Et quand j'ai vu les disques que mon frère a sortis, ça m'a relancé. Ensuite, les groupes Baston et Pain Dimension sont arrivés. C'était reparti ! Maintenant, on a sept ou huit sorties prévues pour l'année 2015 : Venera 4, Future, Triptides, Pain Dimension, les Guillotines, peut-être un groupe suédois. Notre limite actuelle, c'est qu'on ne peut pas financer directement tous ces projets. Il faut donc rentrer de l'argent avec les disques qu'on sort pour pouvoir sortir les prochains. Mais cette limite est saine car elle nous permet de faire un investissement qui n'est pas seulement financier, qui est avant tout un investissement personnel. Ça nous permet de rester impliqués pour défendre nos groupes, de faire le maximum pour les faire connaître et pour leur trouver un « chez-eux » où on les écoute. Je crois dans mes disques, je suis persuadé que si Etienne et moi aimons nos disques, d'autres personnes vont aussi les aimer, vont comprendre notre démarche et notre sensibilité.


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  • Interview de Marc Desse (Paris, 13 octobre 2014).
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Interview de Marc Desse (octobre 2014)

    Baptiste & Gérald : Peux-tu nous présenter ton parcours ? Comment t'es-tu lancé dans la musique ?
    Marc Desse : J'ai commencé la musique quand j'étais petit. Je faisais du piano au conservatoire mais je n'aimais pas trop, c'était un peu la corvée. Un déménagement m'a servi d'excuse pour arrêter le piano, ce qui a été une grosse erreur, je le reconnais aujourd'hui. J'ai donc arrêté la musique pendant plusieurs années et, vers dix-neuf ans, j'ai eu envie d'acheter une guitare. J'ai commencé à apprendre tout seul puis j'ai formé plusieurs groupes. C'est surtout en jouant avec les autres que j'ai vraiment appris à jouer, que j'ai progressé. Jusqu'au jour où j'ai rencontré les mecs avec qui j'ai monté mon premier groupe sérieux : Théâtre Metamorphosis. On faisait une musique punk, électro-punk. J'ai appris pas mal de choses avec ce groupe, on a fait beaucoup d'open mics et de concerts sur Paris. Mais ça n'a jamais vraiment décollé et on a splitté. Et quand je me suis retrouvé tout seul, comme j'avais un peu appris à utiliser les logiciels d'enregistrement, je me suis dit que, dans la petite chambre de bonne que j'occupais à l'époque, j'allais essayer d'enregistrer toute ma musique, complètement orchestrée. C'est comme ça que j'ai sorti mon premier morceau, Petite Anne, qui est sorti en split single avec le groupe The Pipers sur le label américain Bleeding Gold Records. Ca a été suivi d'un EP, lui aussi fait maison. Entre temps, j'ai rencontré David Graw, qui est batteur. Il m'a accompagné sur Vidéo Club puis sur l'album « Nuit Noire ». Cette rencontre a marqué l'avant et l'après dans la production de mes titres, on a entamé un travail par correspondance. Lui est à Détroit, moi à Paris, on ne s'est vus physiquement qu'une seule fois. Je fais le gros du travail ici : j'enregistre tous les instruments sauf la batterie. Puis je lui envoie le résultat, il joue les parties de batterie, et c'est mixé là-bas à Détroit dans le studio d'un de ses potes car il connaît très bien le milieu de la musique. C'est un choix de style car ils font sonner la musique comme je n'arriverais pas à le faire aussi facilement ici, et aussi un choix économique car ça me revient moins cher de produire mon album comme cela. Jusqu'à présent, c'était le nerf de la guerre : la seule solution possible et heureuse. C'est un super batteur et il a su imprégner ma musique du côté rock que je recherchais.

    B&G : Quelles musiques ou quels groupes t'ont influencé ?
    MD : Au départ, c'est le punk. J'écoutais des groupes comme Swans, les Dead Boys, Sonic Youth. J'écoutais aussi beaucoup de rock psyché. Je n'étais pas dans un format pop, j’aimais l'expérimentation. Au début de Théâtre Metamorphosis, j'étais anti pop, je complexifiais trop les choses, je crachais sur les batteurs et je ne voulais que des boîtes à rythmes, j'étais à fond dans l'expérimentation… Et puis j'ai découvert des groupes français comme les Mustang ou les Young Michelin, qui sont devenus Aline. Ils m'ont beaucoup soutenu à mes débuts et nous sommes devenus des potes. Ils m'ont décomplexé par rapport à la pop en français. Ça se ressent dans les derniers enregistrements de Théâtre Metamorphosis et dans mes premiers morceaux tout seul. Puis le côté rock m'a rattrapé dans l'album « Nuit Noire » et j'en suis très content. Quand on est tout seul, c'est assez dur de trouver ses marques et, avec cet album, je les ai regroupées et ça constitue un bon socle pour l'avenir. Ça ne veut pas dire que la suite sera identique mais c'est le début de l'histoire.

    B&G : Dans ton album « Nuit Noire », on trouve aussi beaucoup d'influences post-punk. Cure sur Henri et Elsa, Joy Division sur Tes Larmes, Echo & the Bunnymen sur certaines lignes de guitare de Faits d'Hiver. Et les Stranglers en général pour l'atmosphère de l'album. C'est une volonté de ta part ?
    MD : Oui, c'est un parti pris. Ce sont des groupes que j'adore. Les Stranglers, c'est mon groupe phare, je ne vais pas le cacher (rires). Il y a aussi des groupes français des années 80, comme Marquis de Sade, qui me parlent beaucoup. Pour moi, les années 80 sont l'âge d'or de la musique, le sommet de tout ce qui s'est fait depuis les années 50. En fait, je me suis dit : si je dois faire ce premier album, autant qu'il soit assumé. Le choix du style musical est extrémiste, totalement référencé. J'ai fait un mix, assez inconsciemment finalement, de tout ce que j'aime. Même s'il y a plein de choses que je n'ai pas pu faire ressortir car je voulais que l'album garde une cohérence, une unité sonore. C'est pourquoi je ne me suis pas trop éparpillé.

    B&G : Oui, il y a une unité sonore dans ton album « Nuit Noire », et il y aussi une unité dans l'atmosphère et les textes. Ton album évoque beaucoup les pertes : de l'amour, de l'amitié, du bonheur … Et pourtant, ton album n'est pas sombre.
    MD : Oui, ça a été une bonne cure.

    B&G : D'ailleurs, dans une interview sur internet, tu évoques l'expression religieuse « la nuit noire de l'âme », qui correspond tout à fait à cela.
    MD : Oui. On a perdu un peu le chemin, on cherche un passage. L'album s'appelle « Nuit Noire » car on a l’impression d'être dans une balade nocturne. C'est aussi pour cela que je mets beaucoup de parties instrumentales, parfois volontairement allongées, pour rentrer dans l'atmosphère. Et il s'appelle « Nuit Noire » car c'est aussi un moment d'égarement personnel.

    B&G : Tu as écrit tous tes textes et une vraie poésie s'en dégage. Quel est ton rapport à la littérature ? Tu écrivais avant de faire de la musique.
    MD : Au lycée, j'écrivais des poèmes. Mon rêve, c'était vraiment d'écrire. Quand je me suis mis à la guitare, ce que j'ai trouvé génial, c'est de pouvoir interpréter mes textes. Je me suis donc très vite mis à mettre mes textes en musique. Ca m'est un peu tombé dessus car je n'avais jamais fait cela.

    B&G : Comment travailles-tu ? Que fais-tu en premier : les textes ou la musique ?
    MD : Pour tous les morceaux de l'album, la mélodie est venue avec un bout de texte. Je n'écris pas avant d'avoir la musique, ça va ensemble. J'ai besoin de me mettre dans l'ambiance. Pour la chanson Nuit Noire par exemple, les trois accords du couplet sont arrivés tout de suite avec le texte. Je commence souvent par les couplets et je passe plus de temps ensuite sur les refrains.

    B&G : Tu as envisagé de chanter en anglais ?
    MD : Non, je n'arrive pas à écrire dans une autre langue que le français. Je suis bilingue espagnol, car ma mère est espagnole et mon père français, mais écrire en espagnol me paraît encore compliqué. J'aurais besoin de revivre là-bas, de parler et de penser en permanence en espagnol. Donc, écrire en anglais … Et pourtant j'écoute beaucoup de groupes anglais ou américains.

    B&G : Comment se présente la suite ? Un autre album, un EP ?
    MD : J'ai retravaillé deux morceaux de l'album qui sortiront prochainement accompagnés de clips et d'autres version inédites, de remix,... En fait, j'ai réalisé l'album « Nuit Noire » très vite, en deux mois. Je suis conscient de ses imperfections, c'est pourquoi j'ai tenu à retravailler ces deux morceaux en studio.

    B&G : Pour cet EP, tu travailles de la même manière que pour l'album : tu enregistres tous les instruments tout seul et tu envoies le tout à Détroit ?
    MD : Non. Je travaille beaucoup avec Gaël Etienne, qui travaille aussi avec Lescop ou avec Victorine. C'est un mec très doué. J'ai vraiment trouvé un partenaire musical. Pendant des années, j'ai tout fait tout seul parce que je ne trouvais personne avec qui le faire et parce que je voulais aller vite. Maintenant, je travaille tout le temps avec Gaël, y compris sur des nouveaux morceaux pour un autre EP qui devrait paraître en 2015.

    B&G : Tu n'aimerais pas revenir au format groupe ?
    MD : J'ai un groupe qui m'accompagne sur scène. Mais c'est vrai que j'ai petit pincement au cœur : j'aurais adoré avoir un groupe, pas « Marc Desse et les ... », un vrai groupe.

    B&G : Tu vas aussi partir en tournée ?
    MD : Oui. On va jouer en première partie d'Etienne Daho à Toulouse le 18 décembre. On va aussi jouer près de Lille à Lys-Lez-Lannoy, à Gand en Belgique, peut-être à Reims. On fera des concerts à Paris début 2015.

    Interview de Marc Desse (octobre 2014)

    B&G : On souhaitait aussi évoquer avec toi le festival Passer le Périph', que tu as organisé en mai dernier. Pour nous, ce festival a été un grand moment de bonheur, une sorte de kermesse de la French Pop. Encore bravo et merci !
    MD : C'est vrai que c'était une très belle journée : le soleil, le barbecue, une ambiance de fête entre copains. En fait, au départ, je devais juste faire un concert dans cette salle associative de Villejuif, Le Portail. Et puis j'ai invité des copains à venir jouer, et finalement, il y a eu huit groupes au programme ! On a tous joué pour aider l'association « Organisation des Citoyens Unis ». Et ce qui est fou, c'est que ce festival s'est monté en un mois !

    B&G : Tu comptes organiser une deuxième édition de « Passer le Périph' » ?
    MD : Je ne sais pas du tout. J'ai plein d'idées mais je ne sais pas si j'aurai le temps de les mener à bien. On m'avait demandé de le refaire en septembre mais c'était trop tôt.

    B&G : On va finir avec un questionnaire « Dernier Coup ». Dernier coup de cœur ?
    MD : Hier, j'ai revu le film « Brown Bunny » de Vincent Gallo, que j'adore. J'aime aussi beaucoup mes potes de Feu ! Chatterton, et le groupe américain Tomorrow's Tulips qui vient de sortir un super album (« When »).

    B&G : Dernier coup de gueule ?
    MD : A Bordeaux, en concert, le week-end dernier. Dès les premières notes de Petite Anne sur ma guitare, mon ampli a explosé. Finalement, ça a été un hasard heureux, j'ai fait le crooner pendant tout le concert et ça a très bien marché.

    B&G : Dernier coup dur ?
    MD : En ce moment, tout va bien ! Je n'ai pas de coup dur, c'est cool.


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  • Interview de Bérenger Trompesance et Sylvain Fras, animateurs de l'émission "Oh My Pop" sur Radio Balistiq.
    17 septembre 2014.
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Interview OhMyPop (17 septembre 2014)

    C'est la rentrée des interviews pour "Little John's Pop Life" ! Nous reprenons notre série consacrée à la communauté pop indé, avec une longue interview de Bérenger Trompesance et Sylvain Fras, animateurs de l'émission "Oh My Pop" sur Radio Balistiq, une radio associative de Châteauroux. Pourquoi et comment créer une émission de radio dédiée à la pop ? Quelle est sa place dans la vie culturelle d'une ville ? Quelle est la tonalité de la French Pop ? Quels sont les groupes marquants de 2013 et de la première moitié de 2014 ? Toutes les réponses dans cette interview riche, qui dresse le portrait de deux passionnés de musique.

    Baptiste et Gérald : Pouvez-vous vous présenter ? Pourquoi et comment avez-vous lancé l'émission OhMyPop ?
    Bérenger Trompesance : Je présente les origines ?
    Sylvain Fras : Oui, vas-y. Moi, je suis arrivé en cours.
    BT : OhMyPop, c'est le fruit du hasard. Ca coïncide avec mon arrivée à Châteauroux en 2011 : je tombe sur un concert de Lescop prévu en décembre, je vais chercher mes places dans les locaux de RadioBalistiq, et je rencontre Louis, quelqu'un qui travaillait à la radio à cette époque et qui souhaitait faire une émission sur la pop. On a fait connaissance, et il m'a proposé de faire une émission ensemble et on s'est lancé début 2012. OhMyPop a commencé un petit peu difficilement : il fallait tout construire et on venait d'univers totalement différents. Nos chemins se sont séparés à la fin de la première saison et j'ai attaqué la deuxième saison 2013 – 2014 tout seul. C'était un peu pesant et j'ai fait appel à Sylvain.
    SF : Je travaillais déjà à la radio, j'animais d'autres émissions en parallèle. En fait, la décision de travailler ensemble sur OhMyPop s'est faite autour d'un verre : on discutait de pop et tu m'as dit de venir animer OhMyPop avec toi, au moins une ou deux émissions pour voir. Et c'est parti pour une année. Et on repart pour 2014 – 2015, voire pour plusieurs années. Ca a été une belle rencontre : on n'écoutait pas exactement la même chose mais on avait la même définition de la pop française et de la pop indé. L'émission était le bon endroit pour confronter nos points de vue et opinions sur cette musique, et aussi pour avancer sur des thématiques qu'on définit à l'avance.
    BT : Et tu avais apprécié mon concept de travailler sur les scènes pop. Au lieu de présenter bêtement les albums, on essayait de trouver l'identité d'une ville.
    SF : Oui, il faut savoir qu'on s'intéresse tous les deux aux questions de politique culturelle. Comment la culture s'implique dans la dynamique d'une ville ? Quels sont les liens entre les lieux, les associations, les musiciens, les acteurs d'une manière générale ? Comment et où ils se rencontrent ? Tout cela nous a amené au concept de scène.
    BT : L'atmosphère aussi. Et la météo. Le lieu, la chaleur. Cette manière de voir t'a attiré car cela donnait un axe, une lecture.
    SF : On ne parlait pas que de pop, mais aussi de choses autour de la musique et qui sont très importantes. En un an, on a fait des dossiers sur Bordeaux, Nantes, Rennes, Brooklyn.
    BT : J'avais fait l'Australie, sur des sessions, juste avant que tu arrives.
    SF : On a fait des émissions spéciales sur les festivals d'été, sur ce qui nous a plu dans l'année, sur un bilan de 2013. On a essayé de ratisser large tout en étant précis.
    BT : Ce n'était pas toujours évident !
    SF : Oui. Après, on avait une manière de voir le format de l'émission : 1/2h de news puis 1/2h de dossier thématique. C'est comme cela qu'on se retrouvait plusieurs semaines d'affilée sur une thématique pour pouvoir arriver à parler de tout. Pour l'année prochaine, nous n'avons pas encore complètement défini le format. Ce qui est sûr, c'est que l'identité sera toujours la même mais il y aura plus de cadrage. On va certainement travailler un peu différemment, avec toujours la même envie de faire découvrir des choses ou de faire écouter ce qu'on aime et que les gens connaissent déjà.
    BT : La 1/2h de news s'est imposée à nous. Au départ, on voulait faie uniquement 1/4h. Mais si on présente chacun au moins un titre et qu'on parle un peu, mathématiquement ça pend forcément 1/2h.
    SF : L'an prochain, on va surtout essayer de revenir sur les news et les albums qu'on annonce, et donc d'avoir plus de feedback. Il y aura d'autres surprises.
    BT : Oui, l'habillage de l'émission avec un nouveau générique, dans lequel on va intégrer des nouveaux morceaux qui nous ont plu. Et surtout, la programmation de l'émission va changer : on va passer sur une tranche horaire plus pop, le jeudi de 20h à 21h.

    B&G : Quels sont les groupes et les morceaux qui vous ont fait plonger dans la pop indé ?
    BT : C'est une question très intéressante. Parce que je ne viens pas du tout du monde la pop, même si j'en ai toujours écouté. Je suis surtout un enfant de la radio, qui a beaucoup bercé ma jeunesse. Au départ, j'étais plutôt dans un milieu axé sur le rock un peu dur, sur le punk, des choses plus agressives. Ensuite, je suis allé sur l'électro, puis le hip hop, et la house. C'est lors de cette arrivée dans la house et la French Touch, dans les années 1997 à 2000 que les choses se sont clarifiées. Ce son de la French Touch m'a amené sur des sons plus sucrés, et même plus funky parfois. Si je dois citer des groupes qui m'ont marqué et qui m'ont fait entrer dans le monde de la pop puis dans celui de la pop indé, je dirais Blur et Supergrass. Il y a une énergie, ça fait du bien. J'ai aussi beaucoup écouté de la pop française : Le Marquis de Sade, des groupes de Rennes, donc forcément Etienne Daho.
    SF : De mon côté, c'est un peu différent. A la base, je n'étais pas un grand fan de pop. J'ai commencé à faire de la musique dans des groupes de rock à l'époque où des groupes comme Franz Ferdinand et Arctic Monkeys émegraient sur les grandes radios nationales. C'est comme cela que je suis allé vers la pop brtitannique et la pop indé, dont sont issus ces groupes. Je suis aussi un grand amateur de musique française : Bashung, Gainsbourg, Brel, Brassens. Ce sont des artistes que j'ai beaucoup écoutés et qui m'ont beaucoup influencé. Cela me permet de faire un parallèle avec ces jeunes groupes français qui arrivent et qui sont décomplexés par rapport au texte.

    B&G : Dans votre émission, vous parlez beaucoup du label français Entreprise ? C'est un label avec qui vous avez des contacts ?
    SF : A la base, on a surtout écouté des groupes de ce label. A partir du moment où on a écouté un groupe, on en a écouté un deuxième par curiosité. On les trouvait intéressants et on a commencé à faire des parallèles, par la discussion pendant l'émission : ce label arrive à avoir une patte assez particulière dans la pop.

    B&G : Avez-vous des contacts ou des retours de la communauté pop française ? Labels, groupes, journalistes, blogueurs ?
    BT : En fait, c'est un pur hasard.
    SF : On n'a pas fait l'émission pour avoir des contacts. Le but est de proposer du contenu qui nous plaît d'abord et qu'on a envie de faire découvrir aux gens.
    BT : Il y a aussi le fait que nous sommes à Châteauroux, à 1heure de Bourges. Donc le fait d'aller couvrir le Printemps de Bourges permet d'avoir des contacts : au fil des discussions et des rencontres, on se retrouve nez-à-nez avec des artistes qu'on écoute depuis quelque temps, et qui sont très heureux de savoir qu'on passe leurs morceaux et qui nous suivent.
    SF : Cela donne lieu à des interviews assez particulières : on se retrouve à  discuter avec eux en off, et on branche un micro pour évoquer avec eux la musique en général, leur mécanisme de création, leur vision de la diffusion.
    BT : D'ailleurs, c'est marrant car on n'a jamais rencontré un groupe d'Entreprise, même si on parle beaucoup de ce label. On va maintenant écouter La Lune de Moodoïd.

    BT : Ce n'est pas avec ce groupe d'Entreprise que j'ai pris la plus grosse claque mais c'est celui qui m'intrigue le plus en ce moment. C'est un groupe qui m'a demandé plusieurs écoutes mais qui maintenant me fait bien planer.
    SF : Ça passe souvent comme cela avec beaucoup de groupes et de titres. Quand une nouveauté arrive, je l'écoute une première fois et je ne suis pas forcément fan. C'est en  l'écoutant ensemble pendant l'émission que ça devient évident.
    BT : Il y a l'atmosphère qui joue. Et aussi le matériel avec lequel on écoute. J'ai acheté un nouveau casque pour écouter de la musique et ça change tout.
    SF : Ce n'est pas la première écoute qui permet de juger. Il faut écouter plusieurs fois pour apprécier. Après, pour un groupe comme Juniore, je n'ai pas eu besoin d'écouter trois fois ce qu'ils font pour aimer.
    BT : Moi non plus. Il y a aussi Grand Blanc, et Superets, un groupe de qualité. Et les Blind Digital Citizen, un fabuleux groupe, à apprécier en vinyle à la maison, avec du bon matériel. Tous ces groupes montrent qu'il y a un vrai choix, une tonalité du label Entreprise. On voit que ce sont des gens qui ne font pas les choses que pour gagner de l'argent, qui veulent proposer une couleur musicale.

    B&G : Nous avons constaté que vous êtes très impliqués dans l'animation de la vie pop à Châteauroux, notamment avec des showcases et des concerts comme pour La Féline. Comment est organisée la vie pop à Châteauroux (salles de concert, bars, disquaires, …) ? Quel est l'impact local de votre émission ?
    SF : Il n'y a pas forcément beaucoup de gens qui sont placés sur ce concept d'aller organiser des concerts dans les bars. Habituellement, ce sont plutôt les bars qui proposent du contenu. Il n'y a pas de structure qui coordonne tout cela. Et c'était aussi l'occasion de faire des petits concerts par le biais de la radio, d'en parler, de faire parler de la radio, de l'émission, de ces jeunes groupes qu'on a découverts et aimés.
    BT: Il y a aussi eu les opportunités qui se sont présentées, la volonté de proposer autre chose que les concerts qui ont lieu à Châteauroux. On a une salle attenante à la station de radio, qui s'appelle Le 9 Cube et qu'on peut louer.
    SF : C'est une salle qui ne propose pas de programmation et qui est alimentée en concert par les associations locales qui s'investissent dans l'organisation. Il y a une vraie volonté de développer la musique à Châteauroux, qui n'est pas une très grande ville, 50 000 personnes, 60 000 avec les villages autour, donc avec un public qui n'est pas immense.
    BT : Il y a aussi eu cette volonté de la radio de proposer trois concerts par an, avec des programmations assez larges. On s'est alors dit qu'on ne s'y retrouvait pas assez et qu'on voulait en avoir plus. Châteauroux est une des rares villes où les choses se font à l'envers : d'habitude, ça se passe dans les bars et ça vient vers la scène ; ici, c'était l'inverse, ça commençait dans une salle et il ne se passait rien dans les bars. On s'est dit que c'était peut-être le moment de prendre le créneau des bars. Et comme on habite au milieu de la France, ça permet de faire graviter des groupes ici. Nous sommes tombés sur Banquise qui avait un son cohérent, bien construit, qui correspondait à nos attentes, et nous avons participé au Kiss Kiss Bank Bank de Banquise.
    SF : Dans ce qui va venir plus tard, on va fonctionner sur ce schéma, en passant par du financement participatif, en contactant les groupes et en discutant avec eux. Ca permet aux groupes d'avoir une participation financière assez intéressante pour le développement de leur projet. Et nous, ça nous permet d'avoir un artiste ou un groupe qui vient jouer ici et qui est souvent très content de venir.
    BT : Et très surpris d'avoir eu l'occasion de nous écouter à la radio, de se rendre compte qu'on correspondait à ce qu'il présentait, de venir ici et d'être bien accueilli. On n'est peut-être pas nombreux, on n'a peut-être pas les meilleures salles du monde, mais on a une a capacité d'accueil, de gentillesse, de volonté de choyer les artistes.

    B&G : Quel est le futur de ces soirées concerts ?  D'autres événements sont-ils prévus ?
    SF : Normalement, il n'y aura plus de soirées OhMyPop. Tout simplement parce que, avec Bérenger et d'autres personnes, nous sommes en train de monter une autre association, en parallèle de la radio, qui prendra le relais pour organiser des concerts dans les bars, et potentiellement travailler encore avec la radio pour des showcases. On en reparlera à l'antenne.
    BT : Nous avons fait plusieurs événements OhMyPop : avec Banquise, avec Part Time Friends, un groupe parisien qui commence à être connu et qui va sortir son album, avec Café Glacé, un groupe local que Sylvain connaît bien puisqu’il est partie prenante dans ce groupe. Et avec La Féline, que nous aimons beaucoup, qui est une artiste qui a un univers particulier, très bien écrit et très pop. Maintenant, on aimerait s'élargir : sur la radio, il y a des émissions rock, hip hop, électro, et on souhaiterait aller vers ces univers. Du coup, OhMyPop, c'est trop restrictif. D'où une nouvelle association qui travaille sur les musiques actuelles. C'est la meilleure solution pour nous.

    B&G : Comment définiriez-vous l’humeur et la tonalité de la French Pop actuelle ?
    BT : Ca rejoint l'impact et le rôle des petites radios sur la scène pop française actuelle. Il y a deux possibilités. D'un côté, ça peut être un effet de mode, qui s'emballe et qui va se casser la gueule, avec beaucoup de choses qui vont s’essouffler, comme dans les années 80. De l'autre côté, comme on le fait, il ne faut pas trop s'emballer, essayer de proposer des choses de plus en plus pointues dans la scène rock et pop française, d'aller chercher des choses, notamment sur internet, comme le font les compilations Mostla – La Souterraine, Jeunes Pousses sur le site « Goûte mes disques ».
    SF : Des choses pointues mais pas inaccessibles.
    BT : C'est cela que des petites radios comme la nôtre peuvent proposer : aller chercher des choses qui vont peut-être un jour passer sur Europe 1, France Inter, ou même Le Mouv, et aussi diffuser des choses qui ne passeront jamais sur ces radios, qui resteront indés car les gars ont un boulot à côté et veulent juste faire de la musique pour la musique. C'est comme cela que je conçois notre rôle, en tant que petite radio : être à cheval entre ces deux mondes.
    SF : Sur la tonalité de la French Pop, ce qui m'a marqué et séduit dans ce qui se passe actuellement, c'est le côté très décomplexé par rapport à la tradition française de la chanson à texte, et aussi cette volonté parfois de ne pas trop se poser la question du texte et qui font sonner les mots sur une musique comme le font les Anglais. Il faut le saluer : aujourd'hui, ça paraît peut-être anodin mais il y a une vraie prise de risque dans cette manière de voir les choses.
    BT : Il y a un groupe comme Feu ! Chatterton qui propose une musique qui va lier la tradition de la chanson et du rock français, un peu à la Noir Désir, à une tonalité plus pop qui fait bouger et danser. C'est ce que nous aimons beaucoup.
    SF : C'est un équilibre entre l'histoire de la musique française et l'histoire de la musique pop, qui ne sont pas forcément les mêmes.
    BT : La Malinche de Feu ! Chatterton est une illustration de cela. On peut aussi aller du côté du groupe Aline, qui me fait délirer, qui me rappelle ce qui se faisait dans les années 80 en Angleterre avec Sarah Records, et qui se mélange avec un univers plus français comme celui d'Etienne Daho. On attend maintenant le deuxième album d'Aline.

    B&G : Quels ont été vos coups de cœur de l'année 2013 ?
    SF : De mon côté, c'est « Reflektor » d'Arcade Fire. On attendait tellement un autre album d'Arcade Fire, on se disait « pourvu qu'il soit au moins bien ». Quand on attend tellement un album, on a peur qu'il soit en dessous du précédent. Et « Reflektor » m'a bien plu, il y avait tout ce qu'il fallait, j'ai trouvé ça frais et énergique.
    BT : Je n'ai pas trop compris les critiques. En fait, je n'ai pas pris cet album comme un nouvel album d'Arcade Fire, mais comme l'album d'un nouveau groupe.
    BT : J'ai adoré « Howlin' » de Jagwar Ma, un groupe fabuleux, des Australiens qui vivent en Angleterre et qui ont pris des influences partout. On ne s'y attendait pas du tout. Eux et Temples sont deux groupes très impressionnants. L'album « Howlin' » est maîtrisé de bout en bout, il ne manque rien, il n'y a rien à enlever, rien à ajouter. Ça me fait limite peur pour leur deuxième album car il va falloir atteindre le même niveau et ça va être compliqué.
    SF : Le groupe La Femme a aussi été marquant. Leur album « Psycho Tropical Berlin » est mon coup de cœur. Le permier titre de La Femme que j'ai écouté est Sur La Planche, bien avant la sortie de l'album, que j'avais passé en septembre 2012 dans une autre émission que OhMyPop. C'est à cette époque que je les ai découverts. On les avait vus au Printemps de Bourges en 2013. On était contents de les voir mais on espérait mieux, on était un peu mitigés sur leur prestation. Malgré cela, j'ai beaucoup apprécié leur album. On est typiquement dans ce côté décomplexé dont on parlait : on ne se prend pas la tête avec le texte, et en même temps c'est très travaillé, ils ne font pas n'importe quoi. Et il y a ce côté complètement dingue des personnages qui composent le groupe.

    BT : Je les ai rencontrés deux fois en interviews, une fois très bien, et l'autre fois très désagréable car ils jouaient des personnages. J'ai eu l'occasion d'en rediscuter avec eux après et ils se sont excusés pour l’interview ratée. Ils ont depuis arrêté de jouer ces fameux personnages.
    SF : Ce n'est pas gênant qu'ils jouent des personnages sur scène.
    BT : Oui, mais ça leur arrivait de continuer en dehors de la scène. A côté de cela, il y a une vraie maîtrise du marketing et de ce qu'ils veulent produire, notamment par les deux bonhommes qui mènent le groupe. Ils savent où ils veulent aller, ils ont aussi appris sur le tas, en partant proposer leur travail aux Etats-Unis. Il faudra voir ce que donne leur deuxième album. Mais j'avoue que leur premier album a une énergie incroyable, et que ça déglingue sur scène.
    SF : Tu voulais aussi parler d'un autre coup de cœur.
    BT : Tout à fait. Il s'agit un peu de la version française de Jagwar Ma. Ce sont des univers qui peuvent se retrouver. En fait, ce n'est pas un album, c'est la mixtape de Petit Fantôme, « Stave ». En 2011, il nous avait déjà gratifiés de « Yallah », un EP magnifique, un peu étrange, complètement dingue. C'est un bijou pop « Do It Yourself » comme je les aime. Cette mixtape, réalisée en quelques mois de travail et issue de nulle part, a été une grosse claque. « Stave » est la contraction de « C'est ta vie ». C'est sa manière de présenter qui il est, ce qu'il ressent comme néo-trentenaire, qui en a peu bavé psychologiquement, qui a eu des difficultés, qui peut avoir non pas des regrets mais des choses à exprimer. Beaucoup de magazines ne s'y sont pas trompés, même si je trouve qu'ils sont arrivés un peu tard et que ce monsieur aurait dû être suivi depuis belle lurette. D'ailleurs, il est un des musiciens qui travaillent avec François & the Atlas Mountains, qui est un de nos coups de cœur de 2014.

    B&G : Et quels sont vos coups de cœur de la première moitié de l'année 2014 ?
    SF : Alors moi, j'ai envie de parler d'une artiste qui m'a mis une petite claque. Il s'agit d'Angel Olsen. Son premier titre était sorti fin 2013. Nous en avions parlé pour nos espoirs 2014 et nous ne nous sommes pas trompés sur la qualité de son album « Burn Your Fire For No Witness ». Ce n'est malheureusement pas une artiste qu'on va retrouver à beaucoup d'endroits. Il n'y avait que quelques dates prévues en France, qui doivent d'ailleurs déjà être passées. Ce que j'ai aimé dans cet album, c'est qu'on navigue entre folk, pop et pop indé. Il y a aussi un son un peu cradingue qui traîne sur les guitares. Elle s'amuse avec beaucoup de choses mais il y a un liant entre tout ça, certainement la voix de cette jeune artiste, et l'album tient vraiment la route.

    BT : Je ne suis pas un grand fan mais ça s'écoute très bien, c'est très agréable. C'est indéniablement un très bon album. Ce n'est pas mon truc mais je trouve quand même que c'est très bien fait.
    SF : C'est là où on diffère parfois sur ce qu'on aime dans la pop. Mais c'est très intéressant et enrichissant de pouvoir confronter tout ça et de découvrir des choses qu'on n'écoute pas à la base.
    BT : Moi, j'ai beaucoup aimé l'album de Pégase. J'ai trouvé ça génial, Ladybug notamment.
    SF : Très bon titre, hyper radiophonique.
    BT : Tout à fait. Globalement, l'album est bien construit. J'ai eu la chance de le rencontrer récemment pour une interview de trois quarts d'heure que je dois encore monter. Il est très prolixe, il a beaucoup de références, il sait ce qu'il a à dire, on ne perd pas de temps. Comme il a beaucoup de choses à dire, l'interview est longue mais c'est très intéressant. Et surtout, Pégase, c'est un personnage, un artiste complet. J'ai trouvé ça génial, bien construit de bout en bout, avec une histoire, une introduction, un développement, une conclusion. C'est très cinématographique, on s'attend à voir un film derrière la musique. Je lui ai d'ailleurs demandé si le cinéma pouvait l'intéresser. Et ça ne laisse pas insensible. Dans un autre style, j'ai aussi adoré l'album de Metronomy, « Love Letters », qui est une vraie bombe.
    SF : De mon côté, j'ai eu du mal. Je l'ai écouté et je suis très vite revenu à l'album précédent.
    BT : Je suis revenu au précèdent pour pouvoir me mettre dans « Love Letters ». Je le mets dans la voiture et ça marche ! Chaque titre est une claque. I'm aquarius par exemple, bien produit sur l'album, c'est magnifique. L'intro de The Upsetter est parfaite. Et puis j'ai adoré cet album car il me rend nostalgique d'une époque musicale que je n'ai pas connue, celle de mes parents. Avec des sons qui rappellent Mamas & Papas, des choses qui font penser à du surf rock, avec des éléments de rock prog. Il y a un peu de tout. Ensuite, dans le genre album grosse baffe, il y a « Salad Days » de Mac DeMarco. Je l'ai vu en live : wouah ! Je l'écoute depuis 2011 – 2012. Je conseille : sur scène, c'est énorme. C'est complètement dégingandé, avec des guitares cassées, complètement « Do It Yourself », il est mal fringué et ne ressemble pas à grand-chose, mais c'est le gars le plus cool du monde. Enfin, mon chouchou français du moment, c'est le groupe Cliché qui vient de Bordeaux. Ils sont suivis par le groupe Pendentif.
    SF : Ils devraient passer à Châteauroux.
    BT : Oui, il reste quelques détails à régler et à fixer la date. Ca devrait être la troisième soirée organisée par nos soins et la première par notre nouvelle association. Pour moi, leur morceau Coïncidence est un des meilleurs que j'ai pu écouter ces six derniers mois, encore meilleur que le titre Hélicon : il m'a fait bander !
    SF : Sur ces jolis mots, on va se dire au revoir ! Rendez-vous en septembre pour la troisième saison de OhMyPop.


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